6 août 2023

SORDIDE.COM

 


 

Depuis longtemps, je rêvais de partager ma passion de l’horreur et du dérangeant aux autres. Mais attention : quand je dis horreur, je ne parle pas des films ou des séries de genre qui pullulent sur les plateformes de streaming. Vous savez, ce genre de productions tournées avec un budget dérisoire et des acteurs amateurs qui ne savent même pas pousser un cri convenable, ou montrer une vraie expression de terreur. Ça se voit toujours dans leurs yeux que c’est faux. Je ne sais pas vous, mais moi toutes ces nanas, tous ces mecs qui croient qu’ils sont bons pour être nominés à l’oscar, alors qu’ils ne sont même pas capables de faire ressortir l’émotion de quelqu’un en proie à une vraie souffrance, ça me fait gerber. Et pas dans le bon sens. Pendant toute mon adolescence, j’ai vu des tas de films comme ça, et pas un seul ne m’a fait bondir les tripes du corps du fait de la terreur inspirée par une scène.

 

Que ça soit le faux sang, les blessures pas crédibles et créées n’importe comment, je n’ai jamais ressenti la moindre sensation en voyant ces spectacles de fausses morts interprétées de manière minable. Et il n'y a pas que ces films fauchés qui soient incapables de donner une immersion lors de ces séquences censées retranscrire un véritable moment de détresse. Quel que soit l’acteur, l’actrice, aussi élevé que soit son niveau, aucun n’a jamais pu me faire vibrer le cœur de façon palpable, me donner cette ivresse qu’on ressent face aux derniers instants de vie de quelqu’un. Vous pensez que je suis difficile ? C’est parce que je suis très exigeante, et surtout, c’est lié à une expérience qui m’est arrivé dans ma jeunesse. Un moment que je n’ai jamais oublié, me marquant durablement, et me faisant entrevoir ce à quoi j’aspirais au fond de moi.

 

J’ai été confrontée à la mort à mes 10 ans. Mon grand-père était cardiaque, et il refusait de se retrouver cloîtré dans un hôpital ou une pension pour les personnes de son âge. Il disait que si on l’envoyait dans un de ces lieux qu’il désignait comme des mouroirs, ça signifiait qu’on ne le considérait pas comme une personne à proprement parler. On ne voyait en lui que celui qui apporterait une hausse de revenus, suite à son décès, pour une famille ne sachant plus comment s’en sortir financièrement et attendant impatiemment qu’il crève pour toucher l’héritage. Des mots durs qui peuvent vous choquer de la part d’une personne âgée. Mais si vous y réfléchissez bien, je suis sûr que vous avez connu des familles obsédées par l’argent représenté par un de leurs aînés, passant quasiment pour un objet à cause de ce que sa mort peut apporter comme confort.

 

Mes parents n’étaient pas comme ça, mais mon grand-père avait son caractère bien à lui et jouait du chantage affectif envers sa fille, ma mère, pour ne pas quitter la maison familiale. Ne voulant pas culpabiliser, et étant de nature assez fragile d’un point de vue psychologique, ma mère lui cédait à peu près tous ses caprices. Ce qui causait parfois des disputes avec mon père, qui ne comprenait pas qu’on dépense des sommes folles pour les soins à domicile pour un homme qui ne l’aimait pas, et mettant en danger leur budget chaque mois. D’autant que les demandes de mon grand-père pour son confort pouvaient être exubérants. Il y avait une tension quotidienne au sein de notre demeure, qui prit fin le jour où il est tombé dans l’escalier, le dévalant tout du long, jusqu’à ce que sa tête heurte le sol violemment. Bien que mes parents l’ont cru pendant des années, ce n’était pas un accident. J’en étais la cause.

 

Mon grand-père était assez virulent avec moi, ne comprenant pas que je passais de longues heures sur mon téléphone, likant des photos de célébrités sur Instagram, suivant des stories sur Facebook et adoptant des conseils d’influenceurs. D’autant que je n’avais pas des résultats fabuleux à l’école. Il pensait que le fait que je passais autant de temps sur les réseaux en était la cause. Il me faisait souvent des reproches sur mes tenues, mettant en avant que les jeunes filles de mon âge ne devraient pas s’habiller comme des adultes. Quand il n’utilisait pas des mots plus crus. J’avais développé une haine intense pour lui. 

 

Et ce jour-là, il venait encore de m’inonder de reproches, tentant même de me faire enlever un t-shirt à l’effigie d’une de mes stars, car jugeant l’image indécente. J’ai résisté, et j’ai fini par le pousser dans un geste instinctif de protection de mon bien. Mon père était absent ce jour-là, et maman était dans le jardin, occupée à récolter des légumes pour le repas du soir. Elle n’a donc pas entendu la chute. Du haut de l’escalier, j’ai observé plusieurs minutes durant mon grand-père, attendant qu’il se relève. Mais il ne se passait rien. Pour autant, je ne ressentais pas de peur, ni même d’angoisse à la situation. Au contraire, j’étais intriguée. J’ai descendue les escaliers un à un, jusqu’à me retrouver là où se trouvait le corps de mon grand-père. Il n’était pas encore mort à ce moment. Je l’entendais respirer faiblement, tentant de bouger ses mains et ses jambes, sans y parvenir. Mais il était toujours en vie.

 

Je le voyais faire la tentative de me parler. Sans doute pour me demander d’appeler de l’aide. Je ne sais pas pourquoi exactement, mais j’étais fascinée par le regard qu’il arborait à ce moment, entre terreur et désespoir. Il y avait de la colère aussi envers ma personne, je le sentais au fond de moi. Est-ce que c’est la crainte qu’il dise à maman ce qui s’est passé qui m’a poussée à commettre ce que j’ai fait ensuite ? Sans doute. Ou autre chose en moi qui me guidait d’abréger ses souffrances, voire simplement pour faire en sorte qu’il ne puisse pas dire à maman que j’étais responsable de son état. Toujours est-il que j’ai détachée le foulard que j’avais au cou. Un foulard, lui aussi, à la gloire d’une de mes idoles que mon grand- père détestait tant. Je l’ai plaqué contre la bouche de mon grand-père, appuyant fortement. Je l’entendais tenter de lancer des gémissements, mais ceux-ci ne parvenaient pas à franchir le seuil de sa bouche.

 

Ses bras émettaient des gestes saccadés, des spasmes envahissaient le corps de ce vieil homme qui n’aimait pas ce que j’étais. Je pense que bras et jambes étaient cassés à cause de la chute, raison pour laquelle il ne parvenait pas à m’empêcher de continuer mon acte. Au fur et à mesure que je voyais l’étincelle de sa vie quitter son regard, j’en ressentais quelque chose de jouissif qui se répercutait dans tout mon corps. Un plaisir, une sensation que je ne parvenais pas à définir de manière détaillée. C’était quelque chose que je n’avais jamais ressentie auparavant, difficile à décrire avec des mots. J’aimais ça. J’aimais voir cette vie partir peu à peu. Ce regard empli de terreur devant moi, cette détresse, ces larmes coulant de ses yeux, ça me remplissait d’un tel bonheur.

 

Je ne pensais pas ça à l’époque, ne connaissant pas encore les délices de l’amour avec un homme, mais aujourd’hui je peux dire que j’ai ressentie une sorte d’orgasme à cet instant, aussi étrange que ça puisse paraître. Au bout de quelques minutes, la tête de mon grand-père s’affaissait sur le côté, gardant les yeux ouverts, pendant que tout son corps devenait immobile, seulement parsemé de quelques brefs spasmes post-mortem. J’ai regardé mon œuvre l’espace d’un instant, juste avant de prévenir ma mère, lui disant que j’avais trouvé grand-père au bas des escaliers, le plus calmement et naturellement possible. Ma mère réagissait immédiatement, se précipitant à l’intérieur de la maison. Voyant le corps sans vie, elle tomba à genoux, éclatant en sanglots. Je n’ai pas compris sa réaction. Ce n’était qu’un cadavre, de la chair et des os, rien de plus. Pourquoi faire tant de simagrées pour quelqu’un qui avait pourri la vie de toute notre famille en plus ?

 

Ce jour-là, j’ai compris que je n’étais pas comme toutes les filles de mon âge. Cette expérience était tellement grisante, fascinante. J’avais envie de regoûter à cet instant qui avait pénétré mon âme avec une telle force. C’était presque une obsession. C’est à partir de là que je me suis intéressée à la mort sous toutes ses formes, à travers films, séries et documentaires. Mes parents ne comprenaient pas cette fascination, j’ai même dû subir un entretien avec un psychologue de mon école. Mais celui-ci ne décela rien d’anormal à mon comportement. J’étais juste une fille comme tant d’autres qui aimait se faire peur à travers ce genre de médias. Je ne pouvais pas le dire, bien évidemment, mais je n’étais pas d’accord avec sa conclusion. Je n’avais rien de commun avec les autres filles, et même des garçons que je connaissais. Mais mes parents semblèrent rassurés en entendant ces paroles, alors j’ai gardé ça pour moi. Au moins, ils ne m’obligeraient plus à devoir voir d’autres personnes à cause de ma passion pour la mort.


Le temps a passé, j’ai grandie, atteignant l’âge de 14 ans, mais je n’ai jamais retrouvé la plénitude ressentie lors de la mort de mon grand-père. Et ce, malgré les innombrables métrages, livres et autres documents que j’ai vus et consultés. Tout au plus trouvais-je un certain plaisir à regarder des vieilles photos de personnes décédées, comme le pratiquait certaines familles à une époque révolue. Des photographes payés pour immortaliser le corps de leurs défunts au sein de leur maison. Pour beaucoup de gens d’aujourd’hui, c’est une pratique qui peut paraître morbide. Mais à l’époque, c’était quelque chose de tout à fait naturel. Néanmoins, il n’y avait pas dans la vision de tout ces spectacles de morts, aussi violentes soient-elles dans les films, cette flamme que je recherchais, au même titre que la fois où j’ai découvert ma fascination avec le regard de mon grand-père, sa vie s’enfuyant de son corps.

 

Une sensation à laquelle j’ai pu de nouveau goûter lors de mes 16 ans. Pour fêter leur 25ème anniversaire de mariage, mes parents avaient décidés de s’offrir une nouvelle lune de miel, leur relation étant très nettement revenue au beau fixe depuis la mort de mon grand-père, l’élément qui avait fait naître les disputes entre eux. Pour ne pas que je sois seule durant l’été de cette année-là, la période qu’ils avaient choisis pour leur projet, ils m’ont inscrit à un club de scouts. Une manière pour moi de découvrir les bienfaits de la nature, et surtout de m’éloigner de mes écrans et des films morbides que j’affectionnai. Au début, je leur en ai voulu de m’abandonner ainsi au cœur d’un monde fait de niaiseries et de personnes faisant l’apologie de pratiques que j’abhorrais, et surtout ne correspondant pas à ma personnalité profonde. Celle que me faisait moi telle que j’étais réellement.

 

J’ai eu du mal à me faire à ce séjour qui fut un véritable enfer pour moi. Mais je lui ai finalement trouvé une utilité. Pas grâce aux moniteurs et leurs animations débiles journalières. Mais plutôt parce que j’ai pu assister plusieurs fois à des spectacles digne d’intérêt. Lorsque j’étais de corvée pour récupérer bois ou eau à la rivière, pour les besoins de la cuisine du camp, j’ai pu être témoin de mises à mort entre divers animaux, et de très près. Ça peut vous sembler inconcevable, mais c’était comme si les animaux me faisaient cadeau de leurs affrontements, me permettant de m’approcher dès lors que je le constatais à distance, sans pour autant fuir ou montrer des signes belliqueux à mon encontre.

 

 J’ai pu voir un renard achever un lapin, serrant son cou sanguinolent, voyant l’agonie dans les yeux de cette bête à la merci de son prédateur. Ce n’était pas aussi intense que pour la mort de mon grand-père, mais j’y retrouvais une portion de ce que j’avais ressentie ce jour-là. Une autre fois, ce fut une chouette dévorant sur place une belette. Je n’ai pas eu une clarté aussi bonne que pour le lapin, vu qu’on était en soirée, mais là encore, j’ai pu observer les yeux de cette petite victime, agrémenté de ses cris de terreur et de douleur. Chaque jour, toutes les fois où j’étais chargée de tâches diverses impliquant de me rendre dans les bois, je scrutais les environs, à la recherche de scènes similaires pouvant régaler mes yeux du spectacle.

 

Et puis il y a eu ce jour où mon cœur a battu la chamade comme la première fois. La même sensation, le même plaisir à regarder une vie partir. Une de mes camarades m’avait accompagnée pour pêcher du poisson à la rivière, à environ 800 mètres du camp, hors de portée de quiconque. Je n’avais pas particulièrement appréciée de ne pas me trouver seule comme d’autre fois. Ça pouvait m’empêcher d’assister à une nouvelle scène de mise à mort offerte par les résidents de ces bois. J’avais même demandé à m’occuper en solo de cette tâche, mais le moniteur avait refusé. Quand on est arrivées à proximité de la rivière, il nous fallait descendre une petite butte assez abrupte. Elle n’était pas dangereuse à proprement parler, mais il fallait malgré tout faire preuve de prudence, car la terre était glissante. 

 

 Quand ma camarade a voulu passer devant, alors qu’elle ne savait pas comment aborder ce passage, car y venant pour la première fois, je n’ai pas eu le temps de la prévenir de faire attention. Elle s’est engagée trop rapidement et a glissée sur la terre humide, la faisant déraper brutalement vers le bas de la butte, tête la première. Je l’ai vu heurter de plein fouet un rocher en contrebas. Je me suis hâtée de descendre à mon tour, mais avec plus de prudence que mon infortunée camarade. Elle était étendue sur le sol, le visage sur le côté, avec cette même expression de détresse qu’avait eu mon grand-père. Contrairement à lui, elle parvenait à dire quelques mots, demandant de l’aide :

 

-         -  Aiiide-moi… J’ai… J’ai mal. »

 

Son crâne était paré d’un trou de la grosseur d’une noisette, faisant couler du sang, mais aussi des particules grisâtres. Son corps, tout comme l’avait été mon grand-père des années avant, ne parvenait pas à bouger. Ce n’était pas l’âge cette fois qui était en cause, juste le choc de la chute. J’ai eu ce déclic, cette étincelle qui se rappelait à moi, remontant à la surface, et m’incitant à savourer ce qui se montrait à moi, observant son regard submergé par la peur de mourir. Je me mettais à genoux, avant de me mettre à plat ventre, juste en face de ses yeux, alternant mon observation entre sa blessure à la tête et son visage, de manière à ne rien manquer. J’avais un grand sourire de satisfaction qui se formait, heureuse d’avoir la perspective de goûter à nouveau à ce qui m’avait fascinée des années auparavant, alors que l’objet de mon attention renouvelait son appel à l’aide :

 

-       -  Pourquoi tu m’aides pas… ? Il faut aller prévenir le camp. Prévenir les secours… Reste pas plantée là… Tu veux ma mort ou quoi ?

 

Je ne répondais rien. Bien sûr que je voulais qu'elle meure. Je voulais avoir à nouveau en moi ce sentiment d’extase en voyant la vie partir d’un corps humain. Ça faisait des années que je rêvais d’y assister à nouveau. Hors de question que je manque ce spectacle. Mais mon sujet devenait trop bavard :

 

-       -  Espèce de salope… ! Tu vas vraiment me regarder crever sans rien faire ? Je te jure que tu vas morfler quand les autres seront là. Je leur dirais que t’es une tarée…

 

Mon sourire se dissipait à ce moment. Je voyais ses bras commencer à se mouvoir, tenter de se lever pour échapper à son sort. Je ne pouvais pas la laisser faire. J’aurais aimé que ça dure plus longtemps, mais je ne pouvais pas prendre le risque qu’elle parvienne à retrouver l’usage de sa voix pleinement et crier aux autres de venir, alors qu'elle retrouvait la force nécessaire pour commencer à se relever. J’ai défait alors son foulard autour du cou, ce même foulard propre aux scouts, de manière à le placer devant sa bouche. Et j’ai appuyé de toutes mes forces. Elle se débattait, plus que ne l’avait fait mon grand-père. J’ai été obligée de me mettre sur elle, usant du poids de mon propre corps pour plaquer le sien, et l’empêcher d’avoir des mouvements en même temps que je continuais à appuyer le foulard sur sa bouche. Je ne manquais pas une seconde de son regard tout ce temps. 

 

Elle tentait de crier, mais la pression que j’exerçais sur sa bouche l’empêchait de sortir le moindre mot. Elle me tapait le dos avec ses mains, qui avaient retrouvé un soupçon de mobilité. Ses jambes tapaient le sol, et ça m’excitait encore plus. C’était encore plus jouissif que la première fois. Le fait qu’elle se débattait, tentant désespérément de sauver sa vie, c’était grisant et multipliait mon plaisir. Mon sourire s’agrandissait, pendant que j’accentuais la pression sur sa bouche. Je voyais ses yeux se révulser, en même temps que ses tentatives de se dégager de mon emprise baissaient d’intensité. Elle commençait à faiblir, des larmes coulaient en flots de ses yeux. Bientôt, elle ne parvenait plus à émettre de gémissements sous le foulard, ses bras et ses jambes arrêtaient de bouger, son regard se bloquait, montrant que la vie s’était enfuie d’elle.

 

J’étais exténuée par les efforts que j’avais dû fournir, mais j’avais la même sensation qui avait envahi mon corps lors de la mort de mon grand-père. En plus intense encore. Un bien-être, une libération, les mots me manquent pour décrire ce moment fabuleux que je venais de vivre. J’attendais de reprendre mon souffle et me remettre de ce grand moment avant de me relever, observant encore quelques instants le corps de celle qui venait de m’offrir l’une des meilleures périodes de ma vie. Puis je prenais le chemin du camp, afin de prévenir les moniteurs qu’il y avait eu un « accident » à la rivière.

 

Une fois sur place, je précisais les détails : la chute, la tête qui avait heurté le rocher, le corps sans vie. Personne ne saurait que j’étais à l’origine du décès de ma camarade. J’avais remis en place son foulard, afin que personne ne se doute de quoi que ce soit. J’ai eu la chance que tout ça s’est passé dans une petite ville, avec un légiste pas très curieux et connu pour être un alcoolique notoire. Donc, l’autopsie qu’il a pratiqué s’est limitée à donner comme explication que la mort était dû à la chute, entraînant un traumatisme crânien. Sans chercher d’autre cause. Un examen poussé aurait sans doute conclu à une mort par étouffement, ce qui ne fut pas le cas. Lors de la mort de mon grand-père, il avait bien été évoqué cette conclusion.  Mais au vu de la chute, de l’âge avancé de mon grand-père, de ses problèmes déjà importants pour respirer, connus du médecin de famille, personne n’a soupçonné que j’avais pu être à l’origine de sa mort véritable. D’autant plus que je n’étais qu’une fillette de 10 ans à l’époque. 

 

Cette 2ème expérience m’a encore plus aspirée à ressentir des sensations identiques. Mais je savais que je ne pourrais pas toujours bénéficier de circonstances aussi providentielles, d’accidents propres à ne pas être gênée par des témoins m’empêchant d’assister au spectacle de la vie s’enfuyant d’un corps à travers son regard. A mon sens, vu que ces deux cas étaient déjà dans un état proche de la mort, je n’avais fait que leur éviter de souffrir plus. Je les avais aidé plus que je n’avais été une véritable meurtrière, et je ne me sentais pas coupable du tout. J’avais l’âme d’une libératrice. En grandissant, ce sentiment sur ma personnalité s’est renforcé, et j’avais envie de regoûter aux sensations ayant envahi mon être lors des expériences qui s’étaient offertes à moi.

 

Je pensais que je pourrais obtenir la même extase sans que je participe activement. Je m’en étais aperçue en assistant aux mises à mort de ces animaux dans la forêt. Je restais persuadée qu’observer des morts en direct m’apporterait quelque chose de proche. Pas aussi intense que pratiquer moi-même la mort, mais ça s’approcherait de ce sentiment. Avec le temps, j’ai atteint l’âge adulte, et j’ai acquis une certaine notoriété dans les quartiers mal famés de ma ville. Usant de mon charme pour être la spectatrice privilégiée de morts de la part de personnes faisant partie d’un secteur d’activité non reconnu en tant que « métier ». Je veux bien sûr parler du banditisme. En suivant de près les missions des « nettoyeurs », chargé d’éliminer des ennemis de leur clan. Le fait que ce n'était pas moi qui pratiquait la mort me déculpabilisait de mon sentiment premier de ne m'en prendre qu'à des personnes proches de la fin.

 

C’est là que j’ai commencé à filmer ces morts. Je voulais avoir un souvenir où je pourrais revoir en boucle les regards m’ayant le plus marquée lors de ces exécutions. Il se trouvait que mon compagnon, Barnabé, était adepte de la strangulation, et comprenant donc ma passion d’assister à la lente agonie des victimes. J’ai vécu ainsi 4 ans. Puis Barnabé est mort, et son successeur ne jurait que par les armes à feu, ce qui n’offrait aucun intérêt. Je ne pouvais pas profiter de l’agonie des victimes, car leur mort était trop rapide. Je gardais en moi cette envie de faire profiter ma passion à d’autres. J’ai quitté la vie au sein du banditisme, et j’ai aspiré à d’autres horizons. C’est là que j’ai pensé à créer un site diffusant ces vidéos uniques où on peut assister au processus de la fin d’une vie. Ayant gardé des contacts de mon ancienne et prolifique vie au sein des malfrats de toute sortes, j’ai pu trouver des personnes me garantissant la sécurité du site, installé au cœur du Dark Web. Des associés qui m’ont constitué un réseau de clients payants, accédant au site pour voir les vidéos de ces morts en direct, bien plus attrayante que celles fictives des films et séries et étant la source d’un marché très profitable et hautement rémunérateur.

 

Vous n’imaginez pas à quel point il existe des gens comme moi, hommes ou femmes, prêt à payer des sommes dingues pour obtenir les liens URL des vidéos de mon site particulier. Il m’arrive parfois, pour des clients VIP, de fournir des vidéos à la demande, concernant des types bien précis de morts, autre que la strangulation. Ainsi, j’ai recruté des vidéastes, ceux-ci parcourant la ville à la recherche de mises à mort au hasard des rues. Pendant que d’autres, au contraire, étaient « invités » à filmer des exécutions, des tortures, se concluant toujours par la mort de la « vedette ». Il m’arrive parfois d’avoir des demandes spéciales, pour lesquelles je me charge personnellement de faire les vidéos.

 

Des familles ne supportant plus de voir un de leur membre souffrir inutilement dans un hôpital, et ne comprenant pas qu’on leur refuse l’euthanasie de leur père, leur mère, leur oncle. Ceci au nom d’une éthique médicale empreint d’une morale sélective. Après paiement, je me rends dans ces hôpitaux, soudoyant des infirmières complices, qui me laissent accéder à ces chambres, trop heureuses d’avoir des suppléments de revenus. Cela se passe toujours en journée. D’une part pour avoir une meilleure lumière et parce que ça passe bien plus inaperçu que si j’y allais en pleine nuit. Vous savez ce qu’on dit : pour cacher quelque chose, le mieux c’est de le pratiquer au grand jour. Il y a aussi des cas où c’est plus simple, car les familles font appel à moi au sein de leur maison, la future « vedette » s’y trouvant alitée. Souvent pour des raisons financières, car ne pouvant payer les lourds frais hospitaliers. Mais aussi pour de simples raisons familiales ou anti-médecine.

 

Un commerce lucratif qui me permet d’avoir des vidéos pour assouvir ma passion. Je peux me les visionner autant de fois que je le désire, et je permets à d’autres passionnés comme moi de céder à leurs penchants sordides en toute impunité. C’est d’ailleurs le nom que j’ai donné à mon site : Sordide.com. Il devient de plus en plus populaire au fil des mois. Mais j’entends certains se dire : « pour quelqu’un qui ne veut pas donner la mort à des personnes en pleine santé, il y a une bonne partie de ce marché qui inclue ce type de morts. Comme les exécutions ».

 

Et là, je vous réponds que j’ai dit que je ne voulais pas commettre ce type de morts moi-même, me limitant à achever des personnes n’ayant plus d’espoir de vie. Mais je ne vois aucune objection à ce que d’autres que moi pratiquent des morts impliquant des futures victimes en pleine forme. Peut-être que pour vous, ma logique n’est pas compréhensible, je le conçois. Mais en ce qui me concerne, je n’ai aucun problème de conscience, et je peux ainsi avoir à disposition des dizaines d’heures de morts fabuleuses, de vraies morts non fictives à mater. Je peux me délecter, faire des arrêts sur image, des ralentis pour voir les meilleures scènes. J’en ressens un plaisir total. J’ai trouvé une manière de ponctuer ma vie d’une rente financière régulière, tout en assouvissant ma passion, et j’offre du spectacle à ceux et celles qui ont en eux la même dévotion à ce type de spectacle.

 

Je finirais en vous rappelant que seuls ceux faisant partie d’un cercle privé et régulier du Dark Web peuvent accéder à mon site et ses déjà centaines de vidéos. Inutile de prévenir les autorités : mon équipe a toutes les compétences requises pour savoir comment parer à tout danger, en changeant l’URL chaque jour, envoyant les nouvelles adresses à nos clients dans le même temps, grâce à un algorithme prévu à cet effet qui fait ces envois automatiquement. Et je rajoute que si vous venez à représenter une entrave à mon plaisir, ne soyez pas surpris de devenir très prochainement la star d’une de mes vidéos qui fera la joie de mes clients, et remplira mon compte en banque. Mais si vous voulez simplement devenir un fidèle abonné de mon site, il vous faudra suivre la procédure habituelle, qui passe par un contact auprès des réseaux habituels, si vous êtes un habitué du Dark Web. Alors, peut-être à très bientôt sur le site de Sordide.com…

 

Publié par Fabs

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