9 déc. 2020

TOUTES LES SIRENES NE SONT PAS GENTILLES (Partie 1)



J’ai toujours adoré l’océan :  ses grands espaces, sa sérénité, ses paysages sous-marins, ses créatures marines, … C’était à chaque fois un plaisir de me plonger dans ses vagues, sentir l’écume se jeter sur mon corps. Je pourrais presque dire que c’était comme une drogue dont je ne voulais surtout pas me défaire, tellement je me sentais bien à son contact. Ah, j’ai oublié de vous dire : je suis adepte de la plongée sous-marine. Une vraie passion. Je passais des heures à nager au milieu des lagons, des coraux, toucher le sable des fonds marins, observer les espèces passant sous mes yeux : c’était un régal à chaque fois. Je m’y sentais tellement bien, que j’avais de la peine quand il me fallait rentrer chez moi, dans ma petite maison près de la plage. Attention : je ne faisais pas partie non plus de ces ermites qui refusent toute forme de civilisation en s’éloignant des hommes. Non, je n’en étais pas à ce point à. J’aimais bien aussi me mélanger à mes semblables de temps à autre, faire un petit tour en ville pour flâner sans penser à rien, aller voir mes amis qui étaient toujours heureux de me voir débarquer en un lieu autre que les surfaces bleutées de la mer et ses habitants. C’est juste que je me sentais vraiment en osmose au fond de l’eau, parmi les coquillages, les algues bougeant au rythme des courants marins. Pour moi, c’était le symbole même du bonheur absolu. Je pense que si j’avais pu choisir, je serais devenu triton ou quelque chose d’assimilé.

 

Pourquoi je vous parle de tout ça ? C’est parce que je sais que là où je suis maintenant, il ne me reste plus beaucoup de temps à vivre, et je sais parfaitement que je ne pourrais plus jamais vivre tout ça, à mon grand désespoir. C’est aussi la raison pour laquelle je vous décris tout ça au passé, comme si je revivais mes meilleurs moments avant de partir. Une façon pour moi de m’en aller avec mes meilleurs souvenirs, une nostalgie qui me fait oublier un peu que dans peu de temps, ma vie va s’éteindre pour avoir été trop naïf, persuadé que je pouvais être aimé par un des habitants de cet océan que j’aimais tant. De quoi je parle ? Je ne sais pas si je dois vous en parler. Vous allez sans doute me prendre pour un fou. Ou bien penser que je me shoote à je ne sais quelle substance illicite. Rassurez-vous : je ne suis pas fou. En tout cas, je ne pense pas l’être. Je ne l’étais pas en tout cas. Juste avant que je la rencontre. Celle qui a changé ma vie en tout point. La femme qui a complètement transformé ma vision de cet univers liquide que je considérais comme mon vrai foyer. Qui était-elle vous allez me demander ? J’hésite encore à vous le dire. Certains diraient qu’est-ce qu’elle était. Avant de la rencontrer, je pensais que son espèce était une légende. Le genre d’histoires qu’on raconte aux petits garçons pour qu’ils s’endorment plus facilement. Une créature qu’on rêve de rencontrer, avec qui on espère pouvoir vivre intensément une grande histoire d’amour, tellement le nom même de sa nature fantastique vous fait briller les yeux.

 

Mais je vous ai fait assez patienter. Je vais vous dire qui elle était. Ce qu’elle était. L’amour d’une vie. Magnifique, irréelle, fabuleuse. Je crois qu’il n’existe pas assez de mots pour la décrire. Une chevelure brune tombant jusqu’au bas du dos. Etincelante une fois livrée aux rayons du soleil. Un visage qui ferait damner un saint, tellement sa peau était d’une netteté et d’une perfection à rendre jaloux un miroir. Son petit nez retroussé parvient encore à faire chavirer mon cœur, rien que d’y penser. Ses lèvres que j’ai tant goûté avaient le don de me faire oublier tout et n’importe quoi quand elle daignait les offrir aux miennes. Ses courbes voluptueuses qui s’offraient à mes yeux à chaque matin au réveil qui me faisaient douter d’être encore dans la réalité. Ses jambes merveilleuses, fines, douces, au toucher imparable. Du moins, quand elle était sur la terre ferme. Quand elle était dans l’eau, lors de nos escapades où elle m’a fait tant découvrir de merveilles insoupçonnées, ses jambes laissaient place à une queue, des écailles rugueuses, mais lisses en même temps, et enfin une nageoire, comme tout poisson qui se respecte.

 

Non. Là, je lui manque de respect en utilisant ce terme. C’est celui qu’utiliserait le premier rustre en l’apercevant dans son milieu naturel. Moi, je n’ai pas le droit de dire cela d’elle. Pas après ce que nous avons vécu tous les deux. Une histoire que beaucoup m’envieraient. Bon, je pense que vous avez compris, et que vous vous dites que je me moque de vous. Pourtant, je vous assure que je ne suis pas saoul non plus en vous la décrivant dans toute la splendeur qu’elle était. La plus belle des créatures marines que j’ai pu voir dans ma vie solitaire. Elle s’appelait Krista. Enfin, c’est le nom humain que je lui avais donné. Son nom véritable est imprononçable pour un être humain. Même moi qui ait partagé sa vie pendant plusieurs mois, je n’ai jamais pu le dire. Pour en revenir à ce que je disais précédemment, et pour être sûr que vous ayez bien compris, Krista était une sirène. Avec tout ce que cela implique de féérique.

 

Je sais ce que vous allez dire : les sirènes, ça n’existe pas. Tout comme les serpents de mer, les krakens et autres créatures maritimes. Pourtant, je vous assure que je ne suis pas fou. Ou alors, après tout ce temps passé à deux, je suis fou depuis bien longtemps. Ce n’est pas totalement faux d’ailleurs. J’étais vraiment fou d’elle. Si vous l’aviez vu vous aussi, vous comprendriez mieux. Comment ne pas tomber amoureux d’une telle beauté. Mais peut-être voudriez vous savoir comment je l’ai rencontré ? J’y venais. Je n’ai pas besoin de chercher très loin dans mes souvenirs, car cette rencontre est restée gravé dans ma mémoire. Je faisais ma plongée quotidienne au large des plages de Tampa, la ville où j’habite. Même si je suis assez éloigné des premières maisons la constituant. Cela faisait environ une heure que je nageais quand je la vis. Au début, je crus que j’avais dosé trop fort la teneur en oxygène de ma tenue de plongée, et que je commençais à avoir des hallucinations, ce qui aurait pu être le cas, vu la profondeur à laquelle je me trouvais. Je fermais les yeux, et secouais la tête, comme si le trop plein allait disparaître comme par magie. Je sais, c’est idiot, mais sur le coup, c’est la première idée qui m’est venu en tête.

 

Mais je n’étais pas soumis à l’ivresse des profondeurs ou quoi que ce soit qui aurait pu expliquer la vision que j’avais devant moi. Elle était bien là, sa chevelure flottant au gré des courants, les écailles de sa queue brillant sous l’effet de ma torche. Elle était magnifique. Elle aussi m’avait vu, mais bizarrement, elle ne bougeait pas. Est-ce qu’elle avait l’habitude de voir des humains. C’était peu vraisemblable, vu que j’étais le seul à plonger dans cette partie de l’océan. Non, il y avait autre chose, et je compris vite ce que c’était. Le bout de sa queue était coincé sous un rocher. Le résultat sans doute d’un tremblement de terre sous-marin qui avait dû faire basculer ledit rocher, et l’avait surprise au point de se faire piéger de cette manière. J’hésitais à m’approcher, car je sentais bien qu’elle semblait affolée de ma présence. Je tentais de la rassurer, en lui faisant des gestes amicaux, et en essayant de lui faire comprendre que je voulais l’aider, en montrant le rocher. Au bout d’un instant, la panique dans ses yeux que j’avais pu observer avait disparu. Elle semblait comprendre que je ne lui voulais aucun mal. Je m’approchais alors pour voir si je pouvais débloquer sa queue de son piège.

 

A dire vrai, je n’ai pas eu à faire beaucoup d’effort, car au moment même où je glissai mes mains sous le rocher pour tenter de le soulever suffisamment pour qu’elle puisse se soustraire à son entrave, un nouveau tremblement de terre fit rouler le rocher sur le côté, et la libéra. A peine libérée, elle remonta de quelques mètres, comme pour s’enfuir. Puis, elle stoppa son avancée, et se dirigea vers moi. Je ne sais pas si c’était la panique ou simplement parce que j’étais subjugué par sa beauté, mais je ne pouvais pas bouger un muscle à son approche. Bientôt, elle fut juste devant moi, m’observant de la tête aux pieds. D’un coup, elle enleva mon tuba relié à ma bouteille d’oxygène. Je crus que ma dernière heure était venue, car j’avais vu une créature que je n’étais pas censé avoir rencontré. Mais son objectif n’était pas de me faire succomber à la suffocation par manque d’oxygène.

 

A peine enlevé mon appareil de respiration, elle posa ses lèvres sur les miennes, me livrant le plus merveilleux des baisers que j’ai jamais eu. C’était magique. Je ressentais une onde mélangée de plaisir et de bien-être à ce contact. Après cela, elle remit en place mon tuba, m’observa encore quelques secondes, et repartit dans les profondeurs de l’océan. Il me fallut plusieurs minutes pour me remettre de ça. Je ne peux même pas arriver à décrire ce que j’ai vraiment ressenti à ce moment-là. C’est comme si je m’étais soudain retrouvé dans une sorte de bulle, et tout autour de moi n’avait plus d’importance. Quand je repris enfin mes esprits, elle avait disparue, et je me demandais encore si je n’avais pas rêvé. Mais je savais que non. Le goût de ses lèvres était encore présent sur les miennes. C’était une sensation qu’on ne peut pas oublier. Je remontais alors vers mon bateau, tout en prenant garde de respecter les paliers de décompression, malgré le choc de cette rencontre pas comme les autres. N’importe qui aurait pensé comme moi, c’est-à-dire qu’il semblait évident que je ne reverrais jamais cette créature angélique, tellement notre rencontre était du au fruit du hasard. Mais je me trompais, et Krista allait bientôt me retrouver, mais pas sur le même terrain que notre premier contact. 3 jours plus tard, alors que je revenais d’une nouvelle plongée, durant laquelle je dois bien vous avouer que j’avais tenté de retrouver ma magnifique sirène, sans le moindre succès, et alors que je commençais à ranger mon matériel dans la petite remise à côté de la maison, je vis une silhouette qui se dessinait sur la plage en contrebas du surplomb où se trouvait ma demeure. Il n’était pas rare de voir des amoureux ou des ivrognes se retrouver sur la plage à cette heure-là, et j’étais loin de m’imaginer que ce pouvait être autre chose. Pourtant, la silhouette semblait avoir une démarche différente d’un saoulard, et encore moins de la moitié d’un couple venant au rendez-vous donné par sa dulcinée. Son pas était assuré et rapide, et semblait très clairement savoir où aller.

 

Avec la pénombre, je ne voyais pas bien qui pouvait bien avancer d’une démarche aussi décidée à cette heure du soir, en dehors de ceux que j’avais l’habitude de voir déambuler sur la plage. Je me décidais alors à aller chercher une paire de jumelles afin d’élucider ce petit mystère. Mais quand je revins pour tenter de voir de qui il s’agissait, la silhouette avait disparue. Bon, après tout, ce n’était peut-être qu’un amoureux qui venait de voir sa fiancée cachée dans l’ombre de du promontoire rocheux, et, trop pressé de la revoir, avait accéléré le pas. Je ne m’inquiétais pas plus de ça, et rentrait chez moi. Et puis, peut-être une heure plus tard, j’entendais du bruit venant de l’entrée. Comme j’avais l’habitude de ne jamais fermer à clé, vu que personne ne venait jamais en haut du promontoire, cela pouvait être un petit voyou connaissant cette information loin d’être secrète, vu que tout le monde en ville le savait. Heureusement, j’avais malgré tout de quoi affronter une telle situation, et sortit mon browning de sous mon oreiller. Une vieille habitude que je tenais de mon père. Je sortais de ma chambre, et descendais lentement les escaliers, afin de ne pas alerter mon visiteur inopportun. Arrivé en bas, je cherchais une ombre, une silhouette, n’importe quoi, qui puisse m’indiquer une présence. Je ne tardais pas à voir ce que je cherchais. Même si le mot « voir » était un bien grand mot, au vu de la pénombre. 

 

Je chargeais mon pistolet, et indiquait à mon visiteur de se tenir tranquille, pendant que j’appuyais sur l’interrupteur, afin que je puisse voir de qui il s’agissais. Et là, la stupeur fut à son comble. Devant la porte d’entrée, presque immobile, se tenait la sirène. Mais, contrairement à notre première rencontre, elle avait 2 jambes bien humaines qui lui permettait de se tenir debout, face à moi. Elle était aussi belle que dans mon souvenir. J’étais tellement sous le charme que j’étais incapable de bouger d’un centimètre. Un peu gêné aussi en même temps, car elle était nue comme un ver, augmentant encore plus son irradiante volupté. Je relâchais la pression sur la gâchette de mon pistolet, et posais celui-ci sur le petit meuble près de l’escalier. A dire vrai je ne savais pas trop quoi faire. Est-ce qu’elle comprenait mon langage ? Comme pour répondre à ma question, elle s’approcha doucement vers moi, en me disant de ne pas avoir peur. Qu’elle ne venait pas pour me faire du mal. Elle voulait juste apprendre à plus me connaitre, et me remercier de l’avoir libéré du rocher. J’étais paralysé. C’était comme si j’étais revenu à mes années lycée, lors de la première nuit passée avec ma fiancée de l’époque, juste après le bal de promo. Elle était maintenant tout près de moi, à quelques centimètres seulement, me regardant fixement dans les yeux, avant de me caresser les cheveux.

 

Puis, elle m’embrassa. Tendrement, passionnément, avant de commencer à déboutonner mon pyjama, tout en continuant à me regarder, avec un regard qui en disait long sur ses intentions envers moi. Après ça, je ne me souviens plus très bien ce qui s’est passé. Je me souviens juste de nos corps se mélangeant sur la petite table du salon, puis sur le tapis devant le canapé. Une fusion charnelle comme rarement j’en avais connu, d’une intensité hors de toute explication scientifique. C’était comme un rêve devenant réalité. Un fantasme fou qui s’était développé suite à notre première rencontre, qui prenait forme d’une manière inattendue. Je ne sais pas combien d’heures notre union a durée, mais je me réveillais le lendemain matin dans ma chambre, seul. Elle n’était plus là. Je crus bien un moment que j’avais vraiment rêvé tout ça, et je me frappais la tête, m’insultant même de faire des songes pareils. Pourtant, ça avait eu l’air si réel. Tout à mes questions, et alors que je m’apprêtais à me lever, le rêve reprit forme. Elle était là. Elle m’expliqua qu’elle n’avait pas voulu me réveiller, et qu’elle en avait profité pour visiter la maison, et découvrir toutes ces merveilleuses choses qui constituaient le monde humain. Elle avait tant de questions à me poser. C’était comme une enfant dans un corps d’adulte. Une déesse de beauté qui m’avait ensorcelé.

 

Et les jours qui suivirent furent du même niveau. Je lui apprenais les rudiments de la vie humaine, et elle m’en apprenait plus sur son espèce. Ses coutumes, son mode de vie, ses techniques pour chasser, …. C’est ainsi qu’elle m’apprit qu’elle faisait partie d’un clan qui était rejeté par les autres tribus de leur espèce. Quand je l’avais rencontré, elle était en charge d’une mission pour sauver son peuple de l’extinction. Afin que celui-ci ne disparaisse pas. Mais que depuis qu’elle m’avait rencontré, cette mission était passée au second plan. Qu’elle n’avait pas cessé de penser à moi. Qu’elle avait recherché où j’habitais, grâce à mon odeur. C’est ainsi qu’elle était arrivée ici. A présent, elle voulait vivre avec moi, avec les humains. Elle sentait que c’était ici que serait sa place désormais. Elle en était persuadée. Elle avait l’air tellement sincère. Comment aurais-je pu penser un seul instant que l’ange de bonté qui se trouvait devant moi cachait quelque chose de bien plus dangereux que son apparence pouvait montrer. Et que, contrairement à ce qu’elle m’avait dit, elle n’avait absolument pas mis sa mission au second plan. Dans les jours suivants, j’allais vite découvrir sa vraie nature, et celle-ci était loin d’être aussi idyllique que ce j’imaginais, et que tout le monde pensait savoir sur son espèce. Une nature bien plus terrible et mortelle que n’importe quel prédateur au monde. Même les plus voraces.

 

Je découvris de quoi elle était capable quelques jours plus tard, alors que j’avais entrepris de lui faire découvrir comment se constituait une ville humaine. Une erreur que j’allais regretter amèrement du plus profond de mon être. Une erreur qui allait mettre en péril toute la communauté de ma petite ville dans les mois qui allaient suivre, et peut-être plus encore. Si j’avais pu découvrir son secret plus tôt, peut-être aurais-je pu éviter les évènements qui allaient arriver. Mais pour ça, j’aurais été obligé de la tuer, et je sais très bien, aujourd’hui encore que ça m’aurait été impossible, malgré tout ce que je sais d’elle à ce jour. Pour reprendre mon récit, ce jour-là, nous sommes donc partis en ville, après que j’ai eu toutes les peines du monde à lui faire admettre de porter des vêtements. Au départ, elle avait refusé catégoriquement, rétorquant que le corps des sirènes était fragile, et avait besoin de respirer en permanence. Des habits risquaient d’empêcher sa peau de respirer, et la faire assécher. Ce qui pouvait être dangereux pour elle. Je finis par lui faire comprendre que chez les humains, pour être comme tout le monde, on ne se baladait pas en tenue d’Eve, ça ne se faisait pas. 

 

Après d’intenses négociations, elle accepta finalement de porter un short et un sweat à manches courtes, afin de laisser le plus possible sa peau être en contact avec l’humidité de l’air. Ce n’était pas la première fois que j’avais dû recourir à des discussions un peu « animées ». Auparavant, comme elle avait également besoin de mouiller sa peau au sel de mer, il a fallu lui faire comprendre d’aller se baigner à des heures discrètes, où il y avait peu de chances de croiser des humains qui la verrait se promener le plus naturellement du monde nue sur la plage. Au final, il fut convenu qu’elle prendrait un bain de mer le matin à 5 heures, et le soir après Minuit. Bref. Une fois en ville, autant vous dire que sa présence à mes côtés attisa les plus vives conversations, tout le monde se demandant où j’avais bien pu rencontrer une telle beauté. Il y avait aussi beaucoup de jalousie de la part des groupes de jeunes, qui ne comprenait pas ce que Krista faisait avec un type comme moi.

 

Ah, oui, j’ai oublié de vous dire comment j’ai trouvé son prénom. Elle a essayé de me faire prononcer son vrai prénom, constitué principalement de voyelles, totalement imprononçable. Je cherchais donc un prénom à lui donner, plus « accessible » pour l’oreille humaine. Au même moment, à la télévision, passait un vieux dessin animé « Les aventures de Zak et Crysta ». Elle me dit qu’elle aimait beaucoup ce prénom. Le « c » du prénom devint par la suite un « K », à la suite d’un apprentissage de notre langue un peu hasardeux, que je vous conterais ultérieurement. Donc, alors, que nous nous étions rendus dans plusieurs boutiques, afin de renouveler le stock de nourriture, Krysta étant très gourmande en viande, ce qui aurait du me donner une première alerte. Mais je m’étais dit qu’elle découvrait tout juste notre monde, et que tout était nouveau pour elle. Je ne pouvais pas la freiner là-dessus. Mais elle engouffrait tout de même plusieurs kilos de viande par jour. C’était impressionnant. Forcément, mes réserves se sont vite trouvées à sec. D’où la sortie en ville.

 

Après les courses, et alors que nous étions sur le chemin du retour vers notre maison, Billy et sa bande de petits cons nous attendaient à l’orée du bois. Passage obligé pour se rendre vers le lieu de notre habitation. J’avais bien remarqué en ville que Billy bavait au passage de Krysta. Je l’avais même entendu la siffler et lui demander de venir avec lui, plutôt qu’avec ce « vieux », en parlant de moi. Mais comme j’avais demandé à Krysta de ne pas faire attention, je pensais que ça en resterait là, à force de l’ignorer. Qu’il se lasserait. Ce ne fut pas le cas. Je tentais de forcer le passage du petit groupe, tout en gardant Krysta près de moi, mais ils me mirent à terre, pendant qu’un des membres du groupe bloquait les bras de Krysta. Billy commença à me donner des coups de pied, en me disant que c’était pour m’apprendre à l’avoir ignoré en ville. C’est là que le cauchemar a commencé. Billy continuait à me frapper de plus belle. Je hurlais de douleur, et ça le faisait rigoler. Je tentais de chercher Krysta du regard, et ce que je vis, encore maintenant, ça me glace le sang. Krysta, en voyant Billy me faire du mal, s’est littéralement transformé. Et le mot transformé n’est pas peu dire. Ses yeux se sont allongés en forme d’amande, laissant apparaître un iris semblable à celui des chats, mais en plus prononcé, et surtout d’un bleu presque luminescent. Sa bouche s’est déformée, s’allongeant elle aussi vers le bas, jusqu’à devenir une ouverture béante où émergeait peu à peu des rangées de dents acérées, de forme triangulaire, comme les requins. Sa peau devint écailleuse et dure, tournant au marron, avec des veines noires qui ressortaient. Ses oreilles s’étaient recroquevillées sur elles-mêmes, comme si elles rentraient à l’intérieur du crâne. A la place, des branchies ressortirent, dont les valves bougeaient en permanence, comme si elles aspiraient l’air environnant pour mieux s’imprégner de la puissance des vents. Ses jambes prirent les mêmes aspérités que les bras, et les chaussures qu’elle portaient explosèrent sous le coup de l’allongement de ses pieds, devenus palmés, et parés de griffes à leur bout.

 

A la vue de la transformation de Krysta, l’ado qui tenait celle-ci tenta de la lâcher, mais celle-ci se retourna d’un coup, et prit la tête de ce dernier dans sa gueule devenue encore plus béante, l’écrasant sous la puissance de sa mâchoire, pendant qu’elle arrachait les 2 bras du jeune garçon, avant de les envoyer valdinguer sur les côtés. Le pauvre gars n’eut même pas le temps de comprendre ce qui lui arrivait qu’il était déjà mort. Les deux autres gamins présents tentèrent de s’enfuir, mais Krysta les rattrapa et leur fit subir un sort guère plus enviable. L’un vit ses côtes sorties de leur corps par une des mains monstrueuses de Krysta, pendant que l’autre fut décapité net par son autre main. La tête roula jusque dans les fourrés avoisinants. En voyant ça, Billy criait comme un dératé, me demandant d’arrêter ce monstre, qu’il s’excusait, qu’il ne l’emmerderait plus jamais. Il demanda à Krysta de le laisser partir, qu’il ne voulait pas mourir. Mais Krysta ne semblait pas entendre les supplications de Billy, ou du moins ne le voulait pas. Elle s’approcha de lui, et lui demanda si elle l’excitait toujours autant sous cette forme, tout en glissant sa main dans le pantalon de Billy qui ne parvenait plus à dire quoi que ce soit, tellement il était terrorisé. D’un coup, Krysta arracha les attributs reproducteurs du garçon, et lui montra, en lui disant que maintenant ils ne lui serviraient plus à rien. Billy s’effondra au sol, se tenant le trou laissé à la place, suppliant encore Krysta de le laisser en vie. Mais celle-ci se pencha vers lui et plongea sa main cauchemardesque à travers son crâne, le défonçant, sans le moindre effort.

 

Je regardais Krysta, complément en proie à la panique la plus totale, tellement j’avais peur de subir le même sort. Comme si elle semblait comprendre, elle me regarda, et me rassura, me disant que jamais elle ne pourrait me faire le moindre mal. Juste après, le cauchemar continua. Elle arracha des morceaux du corps de Billy, avant de les porter à sa bouche et de les dévorer en esquissant un sourire satisfait. Elle recommença à plusieurs reprises, jusqu’à ce qu’elle donne l’impression d’être repue. Après cela, elle reprit peu à peu la forme humaine que je connaissais. Elle était maculée de sang de toute part, mais elle ne semblait pas en être embarrassée du tout. Elle ramassa alors les sacs renversés par Billy et ses amis, puis me prit la main, en me disant qu’il était temps de rentrer, et qu’elle n’avait jamais mangé une aussi bonne viande depuis qu’elle était ici, chez les humains. Je n’osais pas dire un mot, tellement je n’arrivais pas à croire ce que je venais de voir. Mais ce n’était qu’un début. Et bientôt, l’appétit vorace de Krysta allait faire encore plus parler de lui, étant à l’origine d’une série de meurtres tous aussi horrible les uns que les autres, et mettant les autorités de la ville en effervescence.

… à suivre

 

Publié par Fabs

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