Nous vivons dans une époque où l’homme est obnubilé par la machine, la mécanique qui la compose, ses différentes possibilités. C’est un miroir de l’évolution humaine, montrant les innombrables rouages de l’avenir qui se montre à nous. Un futur qui se dessine au fur et à mesure de l’imagination, de l’inventivité de l’homme, repoussant chaque jour les frontières de différents domaines, et en particulier la technologie. La montée en flèche de la robotique dans des dizaines de secteurs d’activité montre encore plus ce désir de voir notre société fusionner avec cette machine qui fascine tant de cerveaux scientifiques à travers le monde. Mais il n’y a pas que la science qui utilise cette passion pour montrer l’amour de l’homme envers les composants, de ce qui a longtemps représenté les fondements de la science-fiction dans la littérature, le cinéma, la BD et de nombreux supports artistiques.
Parmi les branches qui ont découlé de cette fascination se trouve le SteamPunk. Un mouvement littéraire au départ, créé par K.W. Jeter, avec ses amis Jim Blaylock et Tim Powers, associant l’ère victorienne, et l’époque de la Révolution Industrielle Britannique, à cette fascination pour la machine et la technologie. On a souvent tendance à croire que le SteamPunk doit son existence à un autre genre littéraire devenu habituel de nos jours, le CyberPunk. Même si les prémices de ce dernier commencent à se révéler dans l’histoire « Fragments of a Hologram Rose » de William Gibson, futur père du mouvement, en 1977, ce dernier ne naitra véritablement qu’avec « Neuromancien », du même auteur, en 1984. Mais les fondations du SteamPunk sont nées en France, avec le roman « 20.000 Lieues Sous Les Mers » de Jules Verne, œuvre reconnue comme le tout premier livre de cette catégorie, même si à l’époque, il n’était pas encore désigné sous cette appellation. Il faudra attendre 1979 et « Morlock Night », suite de « La Machine à Explorer le Temps » d’H.G. Wells, pour voir ce terme naitre, 5 ans avant le CyberPunk, largement utilisé de nos jours dans différents domaines culturels.
Le SteamPunk, lui, a vu une évolution plus discrète, dû à l’extravagance de l’association vestimentaire et technologique ancré dans une époque bien distincte, au contraire de son petit frère, qui s’incruste dans toutes les époques, et particulièrement futuristes. Néanmoins, l’attrait artistique du SteamPunk, pour nombre de passionnés de la technologie, est beaucoup plus important, car il utilise une esthétique, des formes, une utilisation de la mode et des mœurs, bien plus attrayants pour l’œil et l’imagination, que ne l’est le CyberPunk, surtout concentré sur la machine en elle-même, et pas sur sa fusion avec d’autres textures comme le fait le mouvement créé par K.W.Jeter. Nombre d’autres romans, de BD, de films… ont puisé et utilisé cette particularité de fusion des matières au travers d’œuvres uniques et faisant appel à un imaginaire proche de la Fantasy sous certains aspects.
Une fusion de l’homme et la machine par son côté esthétique plus que l’incrustation dans la chair du Cyberpunk, utilisant cyborgs, IA intrusive dans les cerveaux et les membres humains, ou encore des véhicules accentuant couleurs, boutons et données, mais dépourvu d’une vraie âme de beauté visuelle, comme l’offre le SteamPunk. Le plus parlant étant l’utilisation d’objets classiques, comme des boutons de costumes, des montres, des cannes, des livres, parés de rouages et de lignes métalliques, se fondant ensemble, avec un effet artistique indéniable. Et c’est encore plus vrai pour les tenues vestimentaires, sans doute la partie la plus représentative du mouvement, où robes, chapeaux, gantelets, broches, chaussures et costumes victoriens sont associés à des parties de machines autonomes, défiant toute logique, et avec des fonctions toutes aussi délirantes que l’imaginaire de leurs créateurs et créatrices.
C’est dans ce monde que je vis, dans cette uchronie permanente qu’est le SteamPunk, versant régulièrement dans la dystopie, utilisant les ombres des ruelles des villes plongées dans la pénombre tamisée par des lumières propres a dissocier clarté et ténèbres, au travers de tableaux, de dessins, de sculptures. J’aime cette harmonie des couleurs chaudes mélangées au froid du métal des ressorts, des poulies, des tubes aux formes étranges, aux liquides se versant d’un côté à l’autre. Cette folie des tissus et de machineries complexes, mais versant dans une réalité technologique propre à l’époque, où la vapeur ayant donné son nom au genre, enveloppe les villes, et donnant une atmosphère irréelle. A tel point qu’on se surprend presque à voir débarquer un émule de Jack L’Eventreur à chaque coin de rue, à chaque calèche dont même les harnachements des chevaux sont composés de structures métalliques, sans que cela nuise à la beauté du pelage de ces fiers animaux, qui sont les membres de la caste animale la plus usité de ce genre qui fait le bonheur de milliers, de millions de fanas d’art dans le monde…
Cependant, j’ai toujours trouvé qu’il manquait un petit quelque chose à toute cette maestria de formes et de couleurs. Car malgré tout ses atours, on sent le factice, l’improvisation, le simple collage entre machine et habits. Il manque à chaque tenue ce petit « plus » qui donnerait vie, d’une manière incomparable, à ses différents composants. Mais je ne me suis pas présenté : je me nomme Armin Caplehorn. Je suis un modiste reconnu du genre, et aussi un passionné de technologie, passé maitre dans la miniaturisation de systèmes mécaniques complexes. L’héritage sans doute de mon père, un illustre horloger-joailler ayant officié des années en notre belle ville de Londres, la capitale du SteamPunk. Travaillant beaucoup pour le cinéma et la télévision, j’ai accumulé une jolie fortune au fil des années. On a souvent tendance à me considérer comme un original, car il n’y a pas un jour, que ce soit dans la rue, ou sur un plateau de télévision, où je ne suis pas habillé avec une tenue que j’ai confectionnée, et montrant mon amour du genre…
Personnellement, j’aime qu’on me voie comme ça, car c’est devenu mon identité dans les milieux artistiques, ma marque de fabrique. C’est grâce à cette originalité que j’en suis arrivé à me hisser dans les stratosphères de la mode, et qui m’a valu d’avoir comme clients des grands noms du cinéma, du théâtre ou de la chanson, et même des peoples dont le visage parsème la grande majorité des réseaux sociaux du pays, mais aussi au-delà de la Grande-Bretagne, forgeant ma réputation, et aussi mon art, mon amour du SteamPunk, devenu ma figure de proue dans le métier. C’est grâce à cette notoriété que j’ai pu organiser la plus grande convention ayant jamais existé sur ce thème. Un édifice que j’ai fait construire spécialement, un peu en dehors de la city londonienne, pour accueillir tous les plus grands passionnés du mouvement.
L’occasion pour moi de montrer enfin au monde ma propre définition véritable de cet art qu’est le SteamPunk, et qui n’a jamais été montré sous l’apparence qu’elle mérite depuis sa création. Après cette convention, plus personne ne verra ce qui compose cet art de la même manière, car cela va révolutionner tout ce qui est envisageable, tous les désirs les plus fous de voir le SteamPunk devenir LE sujet de touts les médias du monde. A l’issue de cette journée réservée aux vrais amoureux du genre, vous découvrirez ce que ce mouvement devrait être. Une fidèle retranscription de cet univers unique que l’on n’a vu sous sa vraie nature, que dans les romans graphiques ou les films remplis d’effets spéciaux. Ce que je vais proposer à travers cette convention, c’est une évolution. Une Révolution. Une fusion sans équivalent de l’homme et de la machine au sens propre du terme…
C’est ainsi que le jour-J arrivait, et que je voyais tous les invités pénétrer l’un après l’autre au sein de l’immense bâtiment construit spécialement, et composé d’une multitude de zones dédiés aux différentes catégories du SteamPunk, que ce soit la littérature, la BD, la partie graphique, composée de dessins de grands artistes, de lithographie, d’écrans d’ordinateur montrant des œuvres numériques, les sculptures, qu’elles soient en argile, en marbre, ou constituées de vraies parties métalliques, les peintures, et bien sûr, la partie la plus importante, celle du cosplay. D’ailleurs, tous les conviés avaient pour consigne de venir habillés en tenue dans le pur style du genre. Une condition pour pouvoir pénétrer au sein de cet espace dédié à ceux qui avaient la vraie passion du genre en eux. Toute personne ne respectant pas cette condition serait systématiquement refoulée, et n’aurait pas accès aux festivités intérieures. Une condition à laquelle se rajoutait une autre, elle aussi indispensable pour avoir accès à cet antre du SteamPunk. Toute personne, qu’elle ait été invitée spécialement par mes soins, ou ayant acheté sa place auprès de la billetterie en ligne, se devait de porter un badge de ma création, qui était remis à l’entrée par des membres du personnel, dont c’était le rôle principal. Un service de sécurité, eux aussi porteur de ce badge, et arborant bien évidemment une tenue en adéquation avec le thème de la convention, était chargé de surveiller qu’il n’y avait pas de fraudeurs s’étant infiltrés.
Ceux-ci seraient immédiatement reconduits vers la sortie, avec force si nécessaire. Je ne permettrais à personne de venir gâcher la fête que j’avais organisé à la gloire du SteamPunk dans toute sa splendeur… Mais ce ne fut pas le cas, et tout le monde joua le jeu de manière très respectueuse. Ce fut un florilège de passionnés de tout bords, chacun arborant des tenues magnifiques et extravagantes, comme tout fan du mouvement qui se respecte. La fête battait son plein partout où je regardais, et ça me rendait vraiment heureux de voir tout ces visages pleins de joie, ces conversations enflammées autour des œuvres phares du SteamPunk, ces cris d’émerveillement face à des robes de toute beauté, parsemées de roues dentées brodée sur les épaules d’un côté, de chapeau voyant tourner une clepsydre contenant un vrai liquide de l’autre. Ou encore ailleurs, un petit génie montrant son chien mécanique dont les côtés de la gueule étaient constitués de tubes crachant de la vapeur, et son corps voyait des centaines de rouages s’imbriquant les uns dans les autres en continu. Oui, vraiment, où que pouvait se porter mon regard, je ne voyais que du plaisir…
Et cela me réconfortait, car ces grands passionnés allaient bientôt goûter au plaisir de devenir des éléments historiques du SteamPunk. Ils allaient être le SteamPunk, dans le plus pur de ce qu’il représente pour moi. Et donc pour eux. Je savais que je deviendrais ce soir leur bienfaiteur. Celui qui allait amener cet art à sa forme la plus profonde, et qui marquerait le monde de manière durable, en même temps que cette soirée unique sur plusieurs points, se transformerait en point d'orgue de l’évolution humaine. C’est alors que je fis la rencontre d’Amy, elle aussi une grande fan de cette passion commune à cette fête de grande ampleur. Avant qu’elle vienne vers moi, j’avais déjà remarqué l’exceptionnelle qualité de sa robe. Une tenue de Lady, d’un blanc immaculé, dont de multiples pièces de machinerie s’entremêlaient avec la dentelle du tissu, en une sorte de mosaïque d’un effet magique. Assurément la plus belle pièce que j’ai vu jusqu’à présent, et qui montrait tout l’amour du genre.
Elle portait des gantelets dont les côtés étaient faits de tubulures argentés et dorées, et son chapeau était orné d’une fleur donnant l’impression de s’ouvrir et se fermer à la manière d’un automate parfaitement calibré. Même ses chaussures, se constituant de boucles en rouages, et de petites poulies sur toute la périphérie de leur surface, tournant dans le sens inverse de l’aiguille d’une montre, étaient d’une perfection et d’un réalisme époustouflant. Se rajoutait à cela un collier fait d’aiguilles d’horlogerie, imbriquées dans de petits globes, à la manière de boussoles du pur style victorien. Cette tenue, c’était une véritable œuvre d’art à elle toute seule. J’étais à la fois subjugué par cette robe et ses constituants que par la propriétaire, dont le visage respirait la fraicheur et la vie, et au sourire ravageur. Non sans mal, je cachais mon admiration pour cette apparition qui aurait pu faire passer un ange pour une bestiole quelconque. Elle s’adressait alors à moi, me faisant sortir de ma quasi-léthargie, provoqué par sa vision.
« Vous êtes l’organisateur de la Convention ? »
Un moment surpris de cette lucidité, je me rendais compte qu’elle avait les yeux braqués sur la petite étiquette se trouvant sur la poche de mon veston, coincée entre deux petites cheminées en bronze. Je sortais de ma torpeur après cet instant d’absence, qui montrait qu’en plus d’avoir l’allure d’une déesse, elle était une fine observatrice, digne de Sherlock Holmes. Je répondais par l’affirmative à sa question, me présentant, tout en tentant de garder un semblant de dignité au gentleman que je me devais d’être. Je voyais immédiatement son enthousiasme de se trouver en face de celui qui avait fait de sa passion un rêve éveillé, le temps d’une soirée…
« C’est vraiment fabuleux ici ! J’aurais jamais imaginé voir autant de passionnés comme moi du SteamPunk, regroupés dans un espace aussi vaste. Mes yeux ne savent même plus où regarder… »
« Très heureux que cette Convention vous plaise autant. Je suis flatté de recevoir autant de louanges de la part de quelqu’un qui est d’un tel perfectionnisme pour sa tenue… Rassurez-moi : vous participez au concours de costumes, j’espère. Ce serait un crime de ne pas faire partie des candidates avec une tenue aussi magnifique… »
Elle se parait alors d’un grand sourire, et je pus percevoir presque comme une légère rougeur sur ses joues à ma question. Ce qui rajoutait encore plus à son charme…
« Oui, je participe au concours de costume… Sincèrement, vous pensez que j’ai une petite chance d’être sur le podium ? »
« Je ne voudrais pas vous apporter de faux espoirs, ce serait indigne de moi. Et surtout, pour des raisons que vous comprendrez, je ne fais pas partie des juges chargé de choisir le lauréat, ou la lauréate, du concours. Pour éviter toute tentative des candidats à obtenir des points, j’ai jugé plus sage de me contenter de superviser la soirée… »
Voyant une petite pointe de déception, j’étais presque sur le point de tenter de rattraper cette erreur d’appréciation de ma part, quand elle relevait la tête, et, ouvrant de grands yeux, elle reprenait :
« Je comprends : l’impartialité avant tout. C’est l’esprit de base du SteamPunk… Alors, souhaitez-moi bonne chance ! »
Rassuré et admiratif de son esprit de compétition et surtout, une fois encore, de sa passion pour le genre, je ne pouvais que lui accorder ce qu’elle demandait, non sans lui demander son prénom. Histoire que je sache, une fois l’énonciation du vainqueur du concours, si elle avait remporté l’épreuve. Elle me tendait alors la main, à la manière d’une véritable lady victorienne, attendant un baise-main, que mon esprit chevaleresque ne put que lui accorder. Tout à ce fait, elle m’énonçait en même temps son prénom, Amy. Un prénom aussi gracieux que son visage et sa tenue. Nous discutâmes quelque temps sur de multiples sujets, mais tous centrés sur le SteamPunk, et sa passion pour lui qui nous animait, quand une voix retentit, demandant aux candidats et candidates pour le concours de se présenter en coulisses. Amy s’excusait alors, et partait, non sans me gratifier d’un nouveau sourire…
En la regardant rejoindre l’aile où se trouvait l’estrade pour le concours de costumes, je ne pouvais m’empêcher de penser à quel point elle pourrait être le symbole parfait de l’évolution qui allait découler de cette soirée. Une fois que l’heure fatidique arriverait, dépendant du moment d’arrivée de chaque participant à cette convention, elle pourrait devenir la reine de cette soirée, la reine du changement qui se préparait à intervenir, la reine du SteamPunk nouvelle génération qui était sur le point de naitre, grâce à ma technologie. Les petits badges distribués à l’entrée, et obligatoires pour tous, n’était pas que de simples babioles, ou signe de reconnaissance de droit de participer à cette convention pour les agents de sécurité. Ils étaient le futur déclencheur de l’idée de génie que j’avais eu d’offrir à l’humanité les premiers jets de ce qui l’attendait. La fusion de l’homme et de la machine dans le plus pur esprit SteamPunk, comme jamais il n’avait été fait.
Ces badges contenaient un produit de ma fabrication en leur sein. Sous la partie arrière, au cœur du mécanisme le composant, il y avait une petite capsule d’un liquide dont j’avais trouvé la formule de base au sein d’un livre d’alchimie oublié par l’histoire. L’un de ces nombreux artisans de ce qui deviendrait la science telle que nous la connaissons aujourd’hui, mais traité comme des hérétiques à leur époque. J’ignorais comment ce livre avait pu échapper à la destruction, par une église peu encline à accepter le modernisme de la médecine selon leurs dogmes.
Mais il m’avait servi de point de départ pour confectionner quelque chose capable d’accélérer l’action des nanorobots, que j’avais insérés à l’intérieur de la capsule contenant le produit. Des nanorobots conçus pour servir comme une sorte d’aimant pour les parties métalliques présentes sur les tenues de chaque participant, les faisant s’incruster dans la chair de ses « hôtes ». Le produit se chargeant également de modifier l’ADN, afin que métal et chair humaine fusionnent, et ne fassent plus qu’un. Plus un participant portait de pièces métalliques sur sa tenue, plus la transformation serait rapide et intégrale. A l’heure déterminée par le moment où les invités sont arrivés, de minuscules seringues se déploieraient à l’intérieur du badge, s’enfonçant dans la chair, et diffusant le produit et les nanorobots. Dès lors, la mutation s’opérerait, inexorable et définitive, formant un alliage entre l’homme et la machine, tel que le prône les fondements même du SteamPunk. Une évolution de la race humaine qui se perpétuerait ensuite à grande échelle, grâce aux petits gadgets du même ordre, des goodies, composant les articles de ma boutique en ligne dans un premier temps.
Mais d’autres articles de la vie quotidienne seraient aussi parés du même dispositif par la suite : des montres, des bracelets, des piercings, des éléments de scarification, des colliers, des boucles d’oreilles, des écouteurs pour smartphone, des systèmes auditifs pour malentendants, des montres connectées… Autant de dispositifs qui amènerait à un nouvel avènement : celui du nouveau SteamPunk. Celui qui amènera le genre à un nouveau stade d’excellence et de perfection. Mais déjà, j’entendais les premiers cris annonciateurs de cette future révolution. Je voyais des corps se tordre de douleur, tomber au sol, pendant que des rouages se fondaient dans la chair, se mélangeant au sang. Des tubes s’incrustaient dans les veines, des aiguilles de montres s’inséraient sous la peau, gonflant les artères, les modifiant, les déformant, jusqu’à ce qu’elles diffusent le métal fondu dans tout le corps, et formant une invasion intérieure sans possibilité d’être arrêtée. A terme, les corps humains deviendraient des machines vivantes. Rien à voir avec les cyborgs du cinéma.
Ici, le métal fera partie du corps, il s’alliera à la peau, aux organes, s’étendant par le sang à toutes les extrémités, pour créer des hommes et des femmes constituant la nouvelle génération de l’être humain. Un rêve fou était en train de se concrétiser. Des années d’expérience sur des cobayes humains, au sein de laboratoires clandestins se trouvant sous mes usines de confection ont été nécessaire pour arriver à ce moment. Mais voir cet amalgame de métal de chair et d’os fusionnant en une seule entité était la récompense de tout ces efforts. Au fur et à mesure que les cris s’intensifiaient, que le craquement des os s’amplifiait, formant une douce musique à mes oreilles, que les chairs se mélangeant au chrome, au bronze, à l’argent, à l’or, et tout ce qui constituait les formes diverses des éléments du SteamPunk, je sentais la joie m’envahir. Je ressentais un bonheur à l’état pur de voir que mon projet allait s’accomplir, et ouvrant des perspectives à l’homme que personne n’aurait pu imaginer.
Le bruit du changement devenait plus intense, les agents de sécurité se mêlaient à la danse, tout comme les autres membres du personnel. Bientôt, ce serait à mon tour, quand tous seraient transformés. Mais il manquait quelqu’un à cette sarabande infernale. Il manquait celle que j’avais choisi pour reine. Amy. Je me demandais où elle était, si elle était déjà en train d’atteindre ce firmament d’extase métallique. A peine avais-je eu ces pensées que je la vis courir vers moi. Apparemment, elle n’avait pas encore subi les contrecoups de la transformation. Mais elle portait son badge. Donc, elle rejoindrait bientôt les autres, et deviendrait reine. Je l’avais choisi parmi tant d’autres, car elle seule avait montré un amour immense au SteamPunk. Les autres « candidates » à ce titre n’y voyait pas autant de passion. Elle était affolée quand elle s’adressait à moi :
« Monsieur ! Qu’est-ce qu’il se passe ? Les… les costumes… Ils prennent vie ! C’est impossible ! les parties métalliques s’incrustent dans les chairs… Tout le monde se transforme ! C’est horrible ! Est-ce que… Est-ce qu’il va m’arriver la même chose aussi ? »
Je lui faisais part alors de ne pas s’inquiéter, que tout ceci était normal. Que c’était même le but de cette convention. C’était mon idée d’apporter cette évolution à la race humaine… Je voyais son incompréhension sur son visage, et les mots qui suivirent confirmèrent cet état :
« Je ne comprends pas… C’est vous qui êtes à l’origine de ce cauchemar ? Ce n’est pas à cause d’un esprit en colère ou un truc du genre ? »
A nouveau, je lui assurais du bien-fondé de mon cadeau à l’être humain, que grâce à moi, l’homme et la machine ne feraient désormais plus qu’un. Un être nouveau. Elle ne devait pas s’affoler ce qui se passait, car tous ici deviendraient les bases de ce que j’avais élaboré, et constituait le futur de l’homme.
« Mais pourquoi ? Pourquoi vous faites ça ? Je pensais que vous aimiez le SteamPunk… Mais là, ce que vous avez fait, ça n’a plus rien à voir avec la magie du mouvement… »
Elle ne comprenait pas. Sa position restait celle d’une humaine, d’un être de carbone de base, sans idées préconçues pour prétendre à accepter le monde que j’étais en train de créer. Pour qu’elle comprenne mieux, je lui expliquais en détail tout ce qui avait conduit à ce moment magique : la découverte du livre, mes études en métallurgie, et en diverses sciences pour apprendre à utiliser les connaissances du livre, l’apprentissage de la chimie et des méthodes de contrôle des technologies d’aujourd’hui au profit du SteamPunk, tels que les nanorobots. Tout ce que celle que je voulais voir reine de cette nouvelle génération avait besoin de savoir. Mais je fus très déçu de sa réaction
« Je vois… Nous ne sommes que des cobayes… Des poupées… De simples jouets à vos yeux… J’espère que l’enfer vous ouvrira ses portes après ça… Vous n’avez rien d’un amoureux du SteamPunk… Vous n’êtes qu’un grand malade… Je pourrais presque avoir pitié de vous… Mais en fait, j’espère juste que vous crèverez vite, quand on saura ce que vous avez fait… Vous êtes une honte pour tous les fanas du mouvement à travers le monde… »
Je voulais rajouter quelque chose, espérant parvenir à la convaincre d’accepter l’évolution que j’avais conçu et que j’offrais ce jour à ceux qui étaient fragiles, mourant par la maladie, les balles ou d’autres formes d’agression. Je voulais préciser que grâce à la fusion de l’homme et de la machine, la nouvelle structure des corps permettrait de meilleures défenses qu’aucun virus ne saurait atteindre, aucune arme ne pourrait percer ces corps nouveaux, aucune atmosphère ne nous serait néfaste. Mais alors, que je commençais à lui énoncer cette réalité, elle se tordait au sol à son tour, hurlant comme aucun autre autour. Du fait de la grande quantité de parties métalliques de sa tenue, sa transformation s’étendait plus rapidement, lui procurant dans le même temps beaucoup plus de douleur que les autres. Je me posais la question si elle parviendrait à survivre à un tel déferlement de modification génétique, si son corps et son mental tiendraient le coup. Finalement, je m’étais trompé. Elle n’était pas la reine que j’escomptais avoir à mes côtés pour le nouveau monde qui se formait dès ce soir.
Dès demain, les objets SteamPunk seraient mis en vente libre sur mon site web, et les boutiques en ligne partenaires, permettant la création d’hommes nouveaux, ouvrant le monde faible qui peuplait la terre jusqu’à présent à des perspectives qui changerait à jamais le futur que nous envisagions de prime abord. Plus rien ne serait pareil. Il faudrait un temps d’adaptation bien sûr. Au départ, beaucoup des membres du SteamPunk nouvelle génération m’en voudrait, je m’y étais préparé. Mais une fois que tous auraient vu les avantages de la fusion engendrée par ma technologie, ils changeraient d’avis, et feraient de moi le roi de cette nouvelle patrie en devenir. Le roi de la nouvelle humanité. Et tout ceci grâce aux bienfaits du mouvement créé par K.W. Jeter. Quand il a posé les premières lignes du genre, il n’imaginait sans doute pas la révolution qui allait découler de son univers. J’espère qu’il fera partie lui aussi de cette évolution, et qu’il approuvera mon geste et mon initiative d’avoir fait monter au firmament le SteamPunk. Aujourd’hui, j’ai posé les bases du futur, au sein de cet édifice. Demain, cela s’étendra au reste de la planète.
C’est à mon tour. Je ressens déjà l’extase de la transformation, le plaisir de l’alliance du métal et de la chair. C’est tellement grisant. Je ne comprends pas pourquoi Amy n’a pas compris. Son corps est étendu là, devant moi. Son corps n’a pas résisté au changement. Je sens son regard de désapprobation sur moi. Dommage… Elle aurait pu être tellement plus que de la chair morte au sol. D’autres qu’elles n’ont pas supporté cette modification du corps. Les survivants commencent déjà à se relever. Ils sont encore en phase d’incompréhension. C’est à moi de leur expliquer ce qu’ils sont devenus, et ce que va devenir l’humanité en semant les germes du SteamPunk à travers le monde. Une nouvelle ère s’annonce, et fera resplendir l’humanité tout entière…
Publié par Fabs
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