23 oct. 2022

LE CERCLE DES PETRIFIES [Pumpkin Stories-Saison 2]

 


 

Je marche vers mon destin, vers cette clairière où tout doit s’arrêter. Tous mes péchés vont s’y fondre au milieu des autres qui ont subi la punition du PumpkinMan. Cet endroit que chacun connait sous le nom de Cercle des Pétrifiés, ayant interrogés nombre de scientifiques, de théologiens de tous bords et de spécialistes en criminologie. Mais personne n’a jamais pu donner d’explication sur le pourquoi de ce lieu et de ce qui s’y trouvait, l’origine des victimes du PumpkinMan. Rares sont ceux qui osent évoquer son nom, car c’est une légende synonyme de peur et de crainte. Certains disent qu’ils ont entendu son rire semblant sortir des ténèbres le soir d’Halloween, venant de cette forêt. Les jours suivants, on découvre une nouvelle âme prise par lui, se rajoutant à ce qui constitue le cercle.

 

Je ne sais pas très bien qui vous êtes, vous qui me lisez, quels sont vos croyances dans les mythes, les superstitions tournant autour d’Halloween, mais je peux vous dire une chose : le PumpkinMan est loin d’être une de ces multitudes d’histoires qu’on raconte aux enfants autour d’un feu de camp pour les mettre dans l’ambiance et les effrayer. Il est bien réel, et si je suis en mesure de vous donner cette affirmation, c’est parce que je fais partie de celles qui l’ont vu, qui ont provoqué sa colère, et qui en ont payé le prix… Pour mieux comprendre ce qui a causé l’origine de tout ça, je dois remonter à un an de ça, à la veille d’Halloween. Quand j’ai décidé de suivre les conseils d’utilisateurs de Reddit où j’avais expliqué mon ressentiment vis-à-vis de celle que je pensais être une amie. La seule que j’avais en fait. Sans doute dû à mon look loin des standards de la mode au sein du lycée où j’étudiais. Iris a été l’une des rares à s’approcher de moi, à m’offrir son amitié que je pensais sincère à ce moment. Mais dans les faits, je n’étais à ses yeux qu’une manière pour elle de se divertir, elle et son groupe.

 

J’ai sans doute été trop naïve de croire qu’elle abandonnait ses amies richement habillées appartenant à son cercle privilégié, simplement pour passer du temps avec moi. Iris m’a donné confiance en moi, elle s’est occupée d’améliorer ma tenue vestimentaire, elle m’a appris à me maquiller, a partagé avec moi des secrets que je pensais véritable, m’a invité chez elle pour des soirées pyjama. J’avais tellement confiance en elle. Jamais je n’aurais imaginé le piège dans lequel elle s’apprêtait à me faire tomber, et révélant sa vraie nature, le machiavélisme se cachant derrière le masque de bonté qu’elle me montrait. Je pensais vraiment qu’elle était ce qui m’était arrivé de mieux dans ma vie. Mais c’était tout le contraire, comme allait me le montrer ce fameux soir…

 

Quelques heures avant, elle m’avait dit qu’elle voulait me montrer un endroit fabuleux qu’elle avait découvert, et qui n’était connu que de peu de personnes. Elle ne le montrait qu’à ses vraies amies, celle qui comptait pour elle. J’ai cru à ses boniments, et je l’ai suivie jusque là-bas, dans le petit bois avoisinant à la ville. Elle m’a mené près d’un marais aux odeurs pestilentielles. Plusieurs fois je lui ai demandé en quoi cet endroit était si merveilleux. Elle a endormi ma méfiance en m’affirmant que son lieu secret se trouvait tout près, mais qu’il fallait qu’on longe le marais. Que c’était la raison pour laquelle peu de gens connaissait l’existence de cet endroit, car il fallait passer par ce marais aux odeurs épouvantables. J’y ai cru, sans me méfier. On s’est approché du marais. Et puis, au moment où mon attention se portait devant moi, Iris m’a violemment poussé sur le côté, vers le marais.

 

Je me suis étalé dans la boue la tête la première, le visage maculé d’algues et d’autres plantes, le corps englué dans des matières dont je préférais ne pas savoir la teneur. Et c’est là que j’ai entendu les rires de ses amies. Ainsi que celui d’Iris, s’esclaffant encore plus que les autres. Malgré la boue qui se collait à moi, je suis parvenue à me relever, et me retourner. J’ai vu le visage hilare d’Iris et de son groupe d’amies. Le fameux groupe qu’elle m’avait juré avoir laissé car elle n’aimait pas qu’ils se moquent de moi. M’affirmant que j’étais sa seule amie qui méritait toute son attention. Mais tout ça n’était que des mensonges pour mieux m’attirer dans le piège qu’elle avait confectionné. Je n’ai pas répliqué, ça n’aurait fait qu’ajouter à leurs rires si j’avais tenté de dire quoi que ce soit, et je ne voulais pas leur donner ce plaisir.

 

 J’ai vu certains avec leur téléphone ayant filmé la scène. Je savais que je devais m’attendre à ce que ces images soient diffusées en masse sur les réseaux sociaux dès le lendemain. Je ne me suis pas trompée. Pendant plusieurs jours, j’ai subi les rires de tous, à cause de la vidéo de ma chute devenue virale. J’ai développé une haine envers Iris, et c’est ce qui m’a conduit à écrire mon calvaire sur Reddit, comme je vous l’ai dit plus tôt.

 

C’est là qu’on m’a parlé d’un démon pouvant me permettre de me venger. Mais pour cela, il me faudrait m’enfoncer dans le plus profond de la forêt où j’avais déjà subi mon humiliation. Vers une cabane abandonnée, ancien lieu de vie de bûcherons vivant au cœur des bois. On dit que ceux-ci, pour s’assurer de trouver les meilleurs arbres à revendre ensuite, après découpe, ont fait appel à la magie noire, et invoqué un démon. Celui-ci les a aidé à voir leurs désirs se réaliser. Mais cela s’accompagnait d’une contrepartie à la hauteur du vœu. Les bûcherons n’ont plus jamais donné signe de vie, et le démon est resté attaché à notre monde, car le portail d’où il était sorti n’a jamais été refermé. Il y avait cependant des contraintes : on ne pouvait l’invoquer que le jour d’Halloween, à une heure précise et en acceptant la contrepartie, consistant à offrir une partie de sa vie comme paiement. J’avais une telle haine envers Iris que je voyais dans cette perspective le moyen idéal de lui faire subir la pire des vengeances.

 

Alors, j’ai suivi les recommandations que l’on m’avait donné, et je me suis rendu à la fameuse cabane, le jour d’Halloween. Pendant que chacun faisait la fête en ville, au milieu des lumières et des déguisements, des cris d’enfants et du bruit des pétards et du froissement des emballages de friandises, je pénétrais au sein de la cabane. Je prononçais la phrase permettant d’invoquer le démon. Je dois avouer qu’à ce moment-là, je n’étais pas particulièrement tranquille à l’idée de me retrouver face à une créature de l’enfer, mais la motivation de faire payer Iris était plus forte que ma peur. Puis, le démon arrivait, après qu’un immense pentagramme luminescent couvrant le sol, éliminant la poussière le recouvrant, se montrait à moi. La créature grimaçante me demandait mon désir, que je lui indiquais, après un temps de silence. Il m’assurait que ma vengeance serait accomplie, et qu’Iris mourrait d’ici quelques jours. On ne m’avait pas parlé de ça. Ce n’était pas ce que je voulais. Je ne voulais pas sa mort, juste qu’elle subisse à son tour l’humiliation qu’elle méritait. 

 

J’ai voulu demander à ce que la peine soit moins lourde. Mais le démon me fit comprendre que si je voulais changer les termes du contrat, c’est moi qui subirais le contrecoup. Alors, à contre-cœur, j’acceptais. La créature me fit alors part de la contrepartie, qui elle aussi n’était pas du tout ce à quoi je m’attendais. Je pensais devoir renoncer à une partie de mon corps : un doigt, une main, un pied peut-être. Mais c’était bien plus que ça…

 

Je devais tuer moi-même des proches, des personnes qui comptait pour moi, pour payer le dû de ma vengeance. 6 personnes. Cela correspondait aux différentes parties du corps qui allait mourir. Les bras, les jambes, la tête et le tronc. Pour qu’Iris paie, je devais devenir une meurtrière, en ôtant la vie de ceux que j’aimais. C’était horrible, et je tombais à genoux, implorant le démon de prendre tout ce qu’il voulait de moi pour payer ma dette. Mais je ne pouvais pas faire ce qu’il me demandait. Le démon me répondait alors que si je ne choisissais pas moi-même mes futures victimes, c’est lui qui s’en chargerait, et qu’il commencerait par les plus proches de moi. Voyant que le démon ne changerait pas d’avis, j’ai fini par accepter, et je suis devenue un assassin. Le lendemain du pacte, j’ai appris au lycée qu’on avait retrouvé le corps d’Iris au bas des escaliers de sa maison, complètement désarticulée de toute parts, le visage en lambeaux.

 

La police concluait à un accident, et le dossier restait sans suite. Mais moi, je savais que ça n’avait rien à voir avec un accident, et que je ne pouvais plus reculer. Le démon avait tenu parole : il m’avait vengé. De la pire des façons. Et je devais désormais payer ma dette. J’ai commencé par mon voisin, un ami d’enfance. On s’était beaucoup éloigné depuis plusieurs années, depuis qu’il était en couple. Du coup, j’ai pensé que ça serait plus facile de le tuer. Je l’ai appelé par téléphone un soir, sachant que ses parents étaient partis sortir dîner, et que sa copine était malade, cloitrée au lit chez elle. Je lui ai demandé si je pouvais venir un peu chez lui, prétextant que j’étais anéanti par la mort d’Iris. Il est tombé dans le panneau, et m’a accordé que je vienne le voir pour parler de tout ça. Une fois chez lui, après m’être assuré que personne n’était dehors ou aux fenêtres et pouvant me voir, j’ai profité qu’il me tournait le dos pour aller prendre une boisson dans le frigo, et je lui ai transpercé la gorge avec un couteau pris dans le tiroir tout proche. J’ai vu son visage plein d’incompréhension s’abattre au sol, avant que son corps ne bouge plus…

 

Les victimes suivantes furent plus difficiles à tuer, mais je parvenais à respecter le processus demandé par le démon. Ma tante acariâtre, mon cousin stupide, mon grand frère qui vivait reclus dans sa maison, en quasi-ermite qu’il était… Tous étaient des proches, conformément au contrat, mais dont je ne regretterais pas plus que ça la disparition. Néanmoins, la culpabilité me rongeait à chaque meurtre, je tremblais à chaque coulée de sang versé, mon cerveau s’effondrait peu à peu, la folie me gagnait. Et puis, il y eut ce message s’affichant sur la buée du miroir de ma salle de bain, me demandant de tuer la personne qui m’était le plus proche, celle qui comptait le plus pour moi. Je savais ce que le démon me demandait. Il voulait que je tue ma mère. Mais je ne pouvais pas faire ça. Je savais que je ne pouvais voir le démon physiquement que le jour d’Halloween, cela faisait partie des particularités de cette créature, même si je la sentais toujours présente où que j’aille. J’entendais son rire parfois, lors des meurtres.

 

Je n’avais pas de date définie pour tuer et m’acquitter de ma dette. Du moment que j’enlevais la vie des 6 personnes demandées. Mais je ne pouvais pas attenter à la vie de ma mère. Alors, le jour d’Halloween, je suis retourné à la cabane, espérant implorer le démon de prendre ma vie à sa place, de devenir son esclave, tout ce qu’il voulait. Mais en arrivant sur les lieux, je ne m’attendais pas à découvrir l’horrible vérité…. Ce n’était pas le démon que je connaissais qui était là. Mais le PumpkinMan. Je connaissais son existence, pour avoir entendu parler de cette légende. Le protecteur d’Halloween, celui qui punissait ceux qui souillaient l’esprit de cette fête. Il m’indiquait que le démon que je pensais avoir eu affaire, il l’avait détruit depuis bien longtemps, car ses actes allaient à l’encontre du respect d’Halloween.

 

Ceux qui faisaient désormais appel à cette créature, c’est lui, le PumpkinMan, qui prenait son apparence, et faisait croire que leur demande allait être réalisée. C’était la raison pour laquelle la contrepartie était différente de ce que l’on m’avait dit. Il m’apprenait aussi quelque chose qui me fit hurler. Iris n’était pas morte, contrairement à ce que je croyais. En fait, je n’avais jamais quitté cette cabane depuis le jour où j’ai fait ma demande. Il ne s’était pas passé une année, je n’avais pas tué toutes ces personnes. J’étais enfermé dans une sorte de bulle temporelle, un rêve perpétuel, où le PumpkinMan agissait sur mes songes, et me faisait croire que je vivais réellement ce que je voyais. 

 

Je pensais avoir écrit mon histoire à l’extérieur, sur un site web, mais en fait, c’est le PumpkinMan, utilisant une sorte de forme d’hypnose ou quelque chose comme ça, qui me faisait rédiger mes écrits sur un parchemin, destiné à ce qu’il désignait comme un « ami », voulant savoir le destin de ses victimes. J’étais anéantie de cette information, quand le PumpkinMan me prit la main, avant de m’emmener dans la forêt, vers le cercle des Pétrifiés. Cet endroit où des dizaines de statues se trouvent, sans que l’on puisse les déplacer. Elles sont comme ancrées dans le sol, et sont disposées en cercle, d’où le nom de ce lieu.

 

Ces statues, ce sont ceux et celles qui, comme moi, se sont fait piéger par le PumpkinMan, pensant avoir fait un pacte avec un démon pour pouvoir se venger de quelqu’un. Comme moi, elles ont été torturées mentalement, pensant avoir commis des crimes pour payer leur dette, et se retrouvant dans une détresse totale une fois sorties de leur état de sommeil hypnotique… Le PumpkinMan me fit m’installer sur les abords du cercle, avant de me faire finir de rédiger mon histoire, pour vous, à qui ce récit est destiné, sans que je sache ce que vous êtes pour lui. Mais ça n’a pas d’importance. Je n’ai pas respecté Halloween en m’étant rendu dans cette cabane, pensant y trouver le moyen de me venger, et ma punition a été à la hauteur de mon acte. Bientôt, je rejoindrais les autres statues du Cercle des Pétrifiés, ce « message » encore incompréhensible aux yeux des humains, pour les prévenir du sort qui attend ceux qui trahissent l’esprit d’Halloween…

 

 Publié par Fabs

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