16 août 2021

PUMPIN STORIES V - LE COSTUME DANS LA PEAU

 


Comment décrire Lenny autrement qu’en un être vil, dénué de la moindre éthique envers les filles qu’il draguait à tour de bras, avant de les jeter comme on balance un mouchoir au sol. Les considérant ni plus ni moins que comme des objets dont il ne savait que faire une fois obtenu ce qu’il voulait… Le pire était que malgré sa réputation de tombeur sans cœur, qui ne vivait que pour le sexe, se foutant royalement des émotions et sentiments ressenties par toutes ses déjà nombreuses victimes, Lenny continuait d’attirer les cœurs fragiles, de manière incompréhensible aux yeux de ses précédentes proies. Comment une personne aussi horrible d’un point de vue sentimental pouvait avoir toujours autant de succès, alors qu’il figurait depuis longtemps au palmarès des personnes à éviter si on voulait vivre une véritable histoire d’amour ?

 

On ne comptait plus les cœurs brisés par sa faute, suite à une nuit torride, après avoir promis une vie idéale à sa cible, comme un rituel, une ligne de code dont il avait tellement l’habitude qu’elle faisait presque partie de ses gênes. Ce que les étudiants du lycée où il sévissait ne savaient pas, c’est que ce secret faisant attirer vers lui les filles les plus farouches de prime abord vers lui, était d’une origine absolument pas naturelle. S’il était doté d’une aura, un charisme particulier lui assurant rencard sur rencard d’un simple regard, ce n’était pas dû à son ADN de naissance, ni à son assurance dans les gestes pour aller vers ses victimes, et forcer un peu les choses, pour mieux les humilier le lendemain, en diffusant des vidéos, des photos dénudées de ces dernières, prises lors de leurs ébats, via une caméra cachée dans sa chambre, qu’il actionnait à distance, grâce à son téléphone. Actions qui provoquait pleurs, honte et parfois drames sans qu’aucune autorité ne fasse quoi que ce soit à son encontre. Tout ça parce qu’il était le fils unique d’une famille offrant subventions confortables aux dirigeants du lycée.

 

Il profitait largement de ce pouvoir de séduction, laissant libre cours à tous ses fantasmes, dû à un vieux livre trouvé dans le grenier de son oncle, un jour où il s’était rendu chez celui-ci pour lui demander la somme hebdomadaire qu’il avait pris l’habitude de lui extorquer. Son oncle, dans sa jeunesse, fouinait tous les vide-greniers de la région, passionné par les objets ésotériques. C’est ainsi qu’il était entré en possession de ce grimoire que le temps et la mémoire lui avait fait oublier au fil du temps. Tout comme le costume d’Halloween qui figurait aussi dans la malle où Lenny avait trouvé le livre. Un costume à l’allure de citrouille humaine, comportant des manches et des jambières représentant la texture de ce légume typique de la fête des esprits, fantômes et autres créatures qui faisait tout le sel d’Halloween. Ainsi qu’un accessoire en forme de tête de citrouille, avec yeux, nez et bouche, dessinés exactement comme celles ornant les fenêtres des maisonnées le fameux soir.

 

Lenny aimait bien Halloween, car c’était le prétexte de faire de nouvelles conquêtes. Il avait cette facilité déconcertante de séduction depuis qu’il avait atteint l’adolescence, mais depuis qu’il avait découvert ce livre chez son oncle, et qu’il avait récité une formule pouvant accentuer cette faculté d’attirer l’œil des plus belles filles du coin, sa propension de séduction avait atteint des sommets. Et il se disait qu’avec ce costume, trouvé avec le livre, sacrément bien entretenu malgré son âge, il ferait des ravages le soir d’Halloween. Il ne l’avait jamais essayé, n’en voyant pas la nécessité tant que ce n’était pas la période propice. Mais là, on était la veille de la fête, il était seul chez lui, ses riches parents étant partis en voyage en Europe pour fêter leur anniversaire de mariage, c’était l’occasion de voir ce que ce costume donnait sur lui. Et il l’enfila. Il dut s’y prendre en deux fois. La première fois, il l’avait mis par-dessus ses habits, mais ceux-ci le gênaient dans ses mouvements, alors il les avaient quittés, gardant juste son boxer fétiche sur lui, et il avait fait une nouvelle tentative. Concluante cette fois…

 

Ça semblait incroyable, mais il avait l’impression que le costume s’adaptait à son corps, à tous les niveaux, comme une sorte de seconde peau, sans un seul pli ou sensation de parties trop grandes ou trop petites. Il était juste parfaitement adapté à son corps d’esthète. En le mettant, il avait même eu l’impression que la texture du costume se collait à sa peau, se moulant à la moindre des parties : jambes, bras, torse, cou. Et puis il mit la tête de citrouille qui complétait l’ensemble, avant de regarder ce que ça donnait dans une glace. Le résultat était saisissant. Il était certain qu’avec ce costume, en plus de son pouvoir de séduction, et le mot pouvoir n’était pas usurpé, il pourrait attirer à lui nombre de nouvelles conquêtes féminines auprès de lui, les ajoutant à sa « collection ». Satisfait de l’effet du costume, il l’enleva, le plia soigneusement, et le disposa au bout de son lit, prêt à le revêtir à nouveau dès le lendemain soir, pour la fête d’Halloween, avant de se coucher et rêver à ce que ce costume allait lui procurer comme nouveaux plaisirs.

 

Le lendemain, après une matinée passée à flâner dans les rues, profitant de l’absence de cours, décision prise par les dirigeants du lycée pour permettre à tous de profiter au maximum de la journée d’Halloween, il s’adonna à son activité favorite, à savoir séduire des têtes n’étant pas encore passées dans son lit. L’après-midi fut réservée à l’achat de friandises pour les gosses qu’il croiserait ce soir. Lenny avait beau être une ordure envers les filles, il adorait faire plaisir aux enfants en remplissant leurs petits paniers des meilleures sucreries qu’il pouvait leur offrir. Une contradiction due au fait de son manque affectif de la part de ses parents, toujours partis en voyage pour une raison ou une autre, et qui expliquait en partie son attitude envers la gent féminine de son lycée et même en dehors. Il aurait adoré avoir un petit frère ou une petite sœur à choyer, mais ses parents avaient toujours refusé de lui accorder cette faveur, lui ayant même indiqué que sa naissance à lui était déjà une erreur, et qu’il était hors de question d’en rajouter une couche, selon leurs propres mots.

 

Alors, faire plaisir aux autres enfants, ça lui permettait de contrer cette frustration de ne pouvoir donner une vraie affection, contrairement au traitement réservé à ses proies féminines. C’était un fait, autant cette attitude envers les filles faisait de lui un paria auprès de tous, autant les enfants l’adorait, car il était toujours adorable avec eux. Quand il n’était pas occupé à « chasser », il aimait passer du temps à jouer au base-ball ou d’autres activités avec les gosses du quartier. Pour beaucoup, il était difficile de concevoir, en le voyant donner autant d’affection à ces enfants, que c’était la même personne qui n’offrait que des larmes aux filles ayant le malheur de tomber sous son charme. Le soir arrivant, Lenny dit au revoir à ses « petits frères et sœurs adoptifs », comme il aimait les appeler, pour se rendre chez lui, et revêtir le fameux costume, impatient de voir son effet sur les filles ce soir…

 

Une fois chez lui, il se dévêtit et enfila le costume. Sur le coup, il lui sembla qu’il était plus serré sur lui que la veille, mais il se dit que c’était peut-être juste une impression, ou que c’était du au triple hamburger de cet après-midi au fast-food du coin, et il n’y prêta pas plus d’attention. Il descendit dans la rue, toute illuminée des décorations au design de dents de vampires, les lampions à l’allure de citrouilles, ou des « Jack-o-lantern » accrochées au perron des maisons. Il croisa un groupe de filles, toutes aussi mignonnes l’une que l’autre, et il se dit qu’il était temps de tester l’aura du costume associé à son regard. Il les aborda comme il avait l’habitude de le faire. Celles-ci, déjà bien éméchées par la bière, acceptèrent qu’il se joigne à elles, deux d’entre elles ayant déjà plus ou moins succombés à son regard séducteur, et s’amusant de son costume particulier, mais « très sexy » selon leurs dires. Lenny se disait qu’avec ce costume, il avait vraiment fait le bon choix, et une soirée folle s’amorça, entre rires, attouchements discrets mais appréciés, bière à flots et ambiance de fête parfaite. Tout se passait parfaitement bien, quand soudain Lenny sentit un serrement plus important de la part du costume sur sa peau.

 

Au départ, il mit ça sur le compte de l’alcool, mais la sensation de serrement s’amplifia, lui provoquant des douleurs intenses partout sur son corps. Il commença à ressentir également une impression d’étouffement. Il tenta d’enlever son costume, provoquant des encouragements des filles, toutes excitées d’avoir droit à un striptease de sa part. Mais les ouvertures, les fermetures à glissière permettant de retirer le costume avaient disparu. Il se disait qu’il avait dû bien trop boire, et demanda à une des filles si elle pouvait l’aider à trouver les endroits où se trouvaient les fermetures. Sous les sifflets de joie des autres filles, l’une s’approcha, dirigeant vers Lenny un regard significatif. Mais son sourire devint moins important quand elle s’aperçut qu’il n’y avait rien pour enlever le costume, se demandant comment Lenny avait fait pour le mettre. Lenny commença à montrer des signes d’angoisse, de peur même. C’était impossible, il était certain qu’elles y étaient. Il insista envers la fille, s’énervant même, lui disant qu’elle n’était pas drôle de lui mentir. Celle-ci effaça son sourire, n’appréciant pas d’être traitée de menteuse, et rejoignant les autres, avant de partir avec elles, leur disant que finalement ce mec était un gros con, laissant Lenny seul sur la petite prairie où ils s’étaient éclipsés quelques minutes plus tôt.

 

La douleur augmentait au fur et à mesure que Lenny sentait le costume s’enfoncer à présent dans sa chair. Il ne le voyait pas, mais il sentait que son sang coulait le long des parois intérieures du costume, en même temps qu’il était sûr que ses os se brisaient un à un, provoquant encore plus de douleur. La tête du costume exerçait à son tour une pression, serrant toujours plus, écrasant son corps des pieds à la tête, dans un bruit horrible que lui seul semblait entendre. Sortant de la prairie, se dirigeant vers des groupes de personnes, il tenta de demander de l’aide, pendant qu’il pouvait encore marcher, bien que ses pieds ressemblaient plus à de la bouillie qu’autre chose, et que ses jambes parvenaient tout juste à le porter. Mais aucun son ne sortait du costume. Ni les cris de sa bouche, ni les craquements de plus en plus important parsemant son corps. Bientôt, la douleur étant devenu insoutenable, il s’effondra au sol, pendant que les personnes passant à proximité de lui s’écartaient, pensant avoir affaire à un alcoolique ou un névrosé, ignorant la souffrance de Lenny, dont les cris que personne ne pouvait entendre, se turent peu à peu, son corps ayant lâché de toutes parts, écrabouillant ses organes vitaux, arrêtant son cœur. 

 

Lenny ne bougeait plus, écrasé de l’intérieur à cause de ce costume maléfique, chutant en arrière, son dos finissant sur une barrière, donnant l’impression d’un simple costume abandonné en pleine rue aux yeux de tous. A l’intérieur de ce dernier, il n’y avait plus qu’un amas de chair, de sang et d’os, réduits en morceaux à force d’être compressé, et ayant mis fin à l’existence de Lenny. Perché sur un toit, un sourire ricanant émanant d’une citrouille en transparence faisait ressortir un rire sardonique à la vue de Lenny, puni malgré lui pour avoir voulu transgresser la loi d’Halloween, la loi de la fête, en utilisant un costume pour autre chose que ce à quoi il était destiné, et pour n’avoir pas cherché à savoir la provenance ni les facultés de celui-ci.

 

Publié par Fabs

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