1 oct. 2020

L'HERITIER

 


 

J’Entendais le vent frapper avec force les nombreux volets de bois de ses mains invisibles

Les faisant percuter les murs friables de la maison familiale, formant un écho assourdissant

Il semblait prendre un plaisir sadique à cette entreprise, installant une peur perceptible

A travers tout mon corps frissonnant par cette nuit me rappelant mes terreurs d’antan

 

Ce n’était que ma toute première nuit dans cette bâtisse ancestrale et ô combien lugubre

Mais je ressentais déjà la présence fantomatique de mes aïeuls dans chaque couloir

Sentant leur souffle sur ma nuque à chacun de mes pas sur les sols hautement insalubres

Mes mains s’agrippant à ma lampe, comme si mon existence dépendait de sa lumière dérisoire

 

Je haïssais déjà ce jour où j’avais daigné accepter cet héritage maudit en toute bonne foi

La faute à une vie de misère où la faim me tenaillait à chaque nuit que le ciel faisait sur Terre

Houspillé quotidiennement par un propriétaire ayant oublié le sens du mot courtois

Pour me signifier le retard d’un loyer exorbitant, me donnant l’impression de serres

 

J’aurais sans doute dû refuser l’offre du notaire concernant les conditions d’acquisition

3 nuits complètes dans le manoir de feu un oncle inconnu, dont j’étais l’unique héritier

Folie ! Que n’ai-je tourné les talons à l’énoncé de cela, au lieu de vivement signer de front

Aujourd’hui, je ne serais pas à arpenter les pièces de cette demeure du diable aux multiples dangers

 

A voir les visages blêmes des villageois à qui j’avais eu l’audace de quémander ma route

J’aurais dû me demander s’il n’était pas plus sage de rebrousser chemin dans la seconde

Au lieu d’écouter ma soif de richesse trébuchante, qui voyageait sans même un doute

A l’intérieur de ma tête imbécile, obnubilé par la crainte de finir sous la froide neige féconde

 

Les tableaux que je croisais semblaient rire de moi à l’unisson, en une seule et même entité

Leurs sourires moqueurs parvenant à atteindre sans obstacles mon moral déjà au plus bas

Alors que je cherchais le réconfort auprès d’une pièce à l’atmosphère moins pesante à supporter

Traçant mon chemin par les gouttes de sueur perlant sur ma peau, jusqu’à tomber ici et là

 

A aucun moment, je n’ai ressenti le piège qui tissait sa fine toile tout autour de moi inexorablement

Me dirigeant malgré moi vers la grande porte rouge qui allait m’emmener vers le trépas

Comme si j’étais happé par une corde de chanvre, s’étant enroulée sans détout ni sentiments

Par l’esprit majeur qui contrôlait chaque parcelle de ses murs remplis d’amertume et d’effroi

 

 

Je semblais comme hypnotisé par cette ouverture qui s’offrait à moi et à ma naïveté

Alors, je m’avançais vers elle, tel un chant de sirène m’appelant, et contre quoi je ne pouvais lutter

Franchissant son embouchure, rassuré par des ondes m’ayant investies par plusieurs milliers

Avant que celle-ci disparaisse dans le néant, me laissant seul face au vide et à l’anxiété

 

C’est là qu’ils m’apparurent, dans toute la grandeur de leur laideur, physique comme spirituelle

A peine remis de ma stupeur, je sentis leurs longs doigts décharnés transpercer mon corps

Tel des aiguilles de douleur, grattant et fouillant l’intérieur pour en retire son étincelle

Afin de faire de moi leur égal, une nouvelle entité sans chair, dont l’âme accepte son sort

 

Je ne suis désormais plus qu’une ombre parmi d’autres, un nouveau frère des ténèbres

Ayant trouvé sa place dans le monde de l’obscur et ses méandres impalpables et froids

Attendant le jour prochain où un nouveau candidat viendra entendre son oraison funèbre

Ce jour-là, je serai là pour l’accompagner et lui montre le chemin de la nuit et ses lois

 

 

Publié par Fabs

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